J'aime bien ce film, malgré des défauts certains. Commençons par celui du rythme. En effet, je ne sais trop pourquoi, s’il s'agit du montage ou du scénario, mais j’ai la nette impression à chaque revoyure que le film pâtit de plusieurs changements de rythme, de ruptures trop brutales.
D’abord très doux, l'intrigue installe la situation idyllique. Normal. Puis, la présentation plus précise des nombreux personnages de la communauté, avec les interactions plus complexes paraît se jouer sur un tempo plus erratique et à la fin, on a un emballement qui correspond à l’explosion hystérique finale. Tout cela semble logique, sensé. Néanmoins, quand on revoit le film, l'impression que l'histoire ne maîtrise pas ses différents temps se renforce de façon plutôt désagréable. On a la sensation qu'il manque un truc, une pièce dans la machine pour lui donner du liant. Mais que c'est dur de voir en quoi cela n'est pas abouti! C’est paradoxal : le récit suit son fil logique naturel.
Je connais quelqu'un, un poil baba lui même un temps, qui ne supporte pas le regard posé par le film sur cet univers. Évidemment, ce regard est très cruel : en gros, la communauté décrite ici ressemble à un monde d’éclopés, de névrosés en tout genre et surtout bouffi d’hypocrisies.
Malgré tout, je n'arrive pas à être en total accord avec cela. Je ne suis pas certain que le film soit aussi critique qu’il s’en donne l’air. Certes, a priori il est moqueur et méchant. Mais au fond, les personnages sont dépeints bien souvent avec chaleur et bienveillance.
Ceux qui gravitent en dehors de la communauté baba, à commencer par celui de Christian Clavier, ne sont pas mieux lotis en matière d'hypocrisie ou de psychologie branlante. Aussi peut-il être lu comme une dénonciation de la vision angélique du mouvement baba, au même titre que celle de la société traditionnelle, bourgeoise et de consommation que les babas essaient de fuir. Comme le film tire dans toutes les directions, le procès qui peut lui être fait d'être injuste n’est pas légitime.
Surtout, je n'ai pas l'impression qu’il y ait une véritable agressivité à l'égard des personnages. On se moque certes, mais cela reste en fin de compte d’une méchanceté “douce”. Je reste persuadé que les comédiens, comme les scénaristes éprouvent quelque affection pour leurs personnages.
La réalisation très neutre de François Leterrier confirme ce sentiment. De même que l'habillage musical guilleret, délicat en adéquation avec le thème. J'ai un petit faible pour le “riz complet” de Nino Ferrer qui me met en joie dès le générique et la chanson sur James Dean de Martin Lamotte que chante Patrick Fierry à deux reprises, mélancolique et entêtante.
Revoir régulièrement une partie de la troupe du Splendid me procure beaucoup de plaisir. En-deçà des deux “bronzés” et du “père noël”, ces “babas cool” est tout de même un rendez-vous agréable, grâce notamment à ses acteurs.
Christian Clavier dont on a à juste titre critiqué l'évolution de jeu à un certain moment de sa carrière (une hystérisation à la “De Funès” pas toujours maîtrisée) est ici formidable de justesse. Une sobriété qui sert un personnage falot, un poil paumé, sans doute un peu cynique et méchant, finalement victime de ses errements, comme les autres. Anémone, Marie-Anne Chazel, Philippe Léotard et Martin Lamotte sont certainement ceux qui tirent également le meilleur parti de ce scénario.
Un film plaisir, une gourmandise à croquer de temps en temps par nostalgie aussi.
Captures et trombi