oct 2010:

J'avais un souvenir beaucoup plus ému de la dernière fois que je l'avais vu, il y a bien 20 ans de cela ; un ciné-club du vendredi soir sur Antenne 2 ou le cinéma de minuit de FR3?

Jean Renoir est un cinéaste adulé et qui m'échappe encore une fois. Je ne le situe pas, n'arrivant même pas à repérer ses caractéristiques élémentaires, un style, une marque de fabrique, quoi! Quels sont les liens entre ces "bas fonds" et "La grande illusion" par exemple? Ils ne me sautent pas aux yeux. C'est quoi le cinéma de Jean Renoir? Sais pô. Je ne vois rien, je ne sais rien et pourtant mon petit doigt me dit qu'un jour je nagerai là-dedans comme dans une piscine de lait chaud, avec quelques litres d'alcool, histoire de finir de m'enivrer. Je le sens ce cinéma, mais cela ne dépasse pas le bout du nez, ne débouche sur rien d'analysable, de concevable, rien que je ne puisse écrire. Mes sensations restent floues. Je ne sais trop que dire.

Alors l'humanisme? Oui, ma foi, oui, m'enfin, n'est-ce pas une tarte à la crème, une notion qu'on ressort chez tant d'autres réalisateurs? Bien sûr ses personnages sont d'une belle et jouissive truculence. Bien entendu, Renoir les aime, les accompagne, les cajole.

Louis Jouvet en tête s'offre une douce rigolade avec un aristocrate sans le sou, je m'en foutiste et dont le fantasme ultime consiste à dormir dans l'herbe, un petit prince de l'anarchisme, dont le regard perçant s'amuse avec espièglerie des bases agitations de la bête humanité, la vaniteuse et l'intéressée. Un très beau rôle, le plus intrigant et le plus racé du film.

Face à lui, son double, son alter ego, son Yang, opposable parfait, ça colle entre eux à la première poignée de main, pacte naturel et tacite. Jean Gabin en effet est né dans la rue. Sa mâchoire se serre facilement à l'évocation de la bêtise humaine. Sa misanthropie provient des coups qu'il a reçu et de ceux qu'il a été obligé de donner. Il méprise par impulsivité, comme un réflexe de survie. Il aspire à la quiétude, la bourgeoise, celle qu'offre l'assurance d'être aimé et de pouvoir construire une histoire à deux. Un romantique fatigué des bas fonds.

C'est à ce croisement de deux trajectoires, deux vies que Renoir pose sa caméra.

Après, le reste... que ce soit l'adipeux André Gabriello, le couple de Ténardier (Vladimir Sokoloff / Suzy Prim) ou encore l'halluciné Robert Le Vigan décidément abonné aux rôles de barjoteux toxico, toute cette engeance ne bouleverse ni mon petit cœur, ni ma frêle cervelle.

Un peu déçu par le jeu bizarroïde de Junie Astor, très théâtral, un peu figé. Son visage ultra maquillé, sur-dessiné évoque la marionnette ou la poupée de porcelaine, un objet fragile et plutôt inerte, artificielle, par conséquent un être peu attirant finalement.

La réalisation, comme je le disais plus haut en préambule, ne me parle pas vraiment. La caméra se déplace tout doucement. Les zooms ou retraits sont délicats et jamais sur la profondeur. Le travail sur la photographie de Fédote Bourgasoff et Jean Bachelet est beaucoup plus évident pour moi. La composition des cadres est parfois très recherchée, savante, très fine. Forts appréciables soins qui donnent à l'ensemble une vision formelle des plus agréables.

La propreté du dvd Criterion est magnifique bien entendu et assure une délicieuse lecture malgré un film par moments visiblement abimé.

Voyez, je vous avais bien dit : je n'ai pas grand chose à dire et ce n'est pas normal. Je sens bien qu'il y a des livres à écrire sur Renoir et ses films, mais mes yeux restent blancs. Je ne vois rien. Un jour, à force de chercher dans la filmographie de Renoir, je trouverai la clé. Persuadé!
Alligator
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le 14 avr. 2013

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