Quand je dis que je suis un grand fan des Charlots, en général on me rit au nez, on se moque. Mais je m’en cague menu. Eux-mêmes n’ont jamais été pris très au sérieux alors qu’ils étaient les rois du box-office dans les années 70. Leurs films cumulent 40 millions de spectateurs en France, et environ 1 milliard à travers le monde, où ils étaient plus connus sous le nom Crazy Boys. Mais à l’instar de Bud Spencer et Terence Hill, j’ai grandi avec Les Charlots. J’ai usé les VHS de la collection familiale au point de connaitre les dialogues de certains films par cœur et de me marrer comme un con devant mon écran avec le frangin à chacun des visionnages. Et je n’ai même pas honte, chacun ses petits travers. Mais en grandissant, je me suis rendu compte que je n’avais pas tout vu des Charlots, à commencer par Les Bidasses en Folie, leur deuxième film, celui qui a réellement tout lancé pour eux, qui avec 7 millions d’entrées au box-office fût le plus gros succès de l’année 1971 en France. Retour sur le film qui a lancé la mode chez nous des bidasseries.
A l’origine, les Charlots forment un groupe musical, Les Problèmes, qui accompagnent le chanteur Antoine. Ils assurent également au milieu des années 60 les premières parties de stars telles que Françoise Hardy, Johnny Hallyday ou encore Claude François. Un peu plus tard, ils sont même élus par le magazine Rolling Stone meilleur musiciens français et font même, avec le groupe Téléphone, la première partie des Rolling Stones. A la fin des années 60, Les Problèmes deviennent Les Charlots et se spécialisent dans la chanson humoristique avec des chansons telles que Paulette la Reine des Paupiettes ou des détournements de tubes du moment. Cette carrière de trublions de la chanson française, ils la continueront jusque dans les années 80 avec des tubes tels que Merci Patron (1972) ou L’Apérobic (1982). Mais en parallèle, ils se lancent dans le cinéma dès 1970 grâce à Philippe Clair et son film La Grande Java. C’est un succès, 3.4 millions d’entrées, Philippe Clair leur propose un nouveau film qu’ils refusent étant donné qu’ils ne s’entendent pas trop avec ce dernier. Mais par contre, sur le tournage de La Grande Java, ils font la rencontre d’un certain Claude Zidi, cadreur sur La Grande Java, qui leur propose de jouer dans son premier film : Les Bidasses en Folie. Succès monumental, 7 millions d’entrées donc, et le début d’une grande collaboration puis qu’ils tourneront ensemble dans la foulée Les Fous du Stade (1972), Le Grand Bazar (1973) et Les Bidasses s’en vont en guerre (1974). C’est également à ce moment-là qu’ils commencent à beaucoup s’exporter à travers le monde. Le succès des Bidasses en Folie fut tel qu’il permit à Christian Fechner de fonder sa propre société de production et ainsi lancer sa carrière de producteur (Il produisit des succès tels que La Course à l’Échalote, L’Aile ou la Cuisse, La Zizanie ou encore Papy fait de la Résistance). Mais qu’en est-il réellement de ce film rempli de bonne humeur aux forts relents antimilitaristes et antisociaux ? Eh bien, malgré le succès, il ne s’agit clairement pas de leur meilleure bobine.
Les Charlots vont camper ici leurs personnages habituels. Gérard est le dragueur du dimanche, Phil celui à qui il arrive toujours des couilles, Jean le gentil, et Jean-Guy a une force étonnamment grande. On retrouve également dans le film des acteurs qu’on verra dans d’autres films du quatuor comme par exemple Jacques Seiler, le fameux Sergent Belec, qu’on verra par la suite dans Les Fous du Stade, Le Grand Bazar ou encore les 2 films sur les Mousquetaires. On a déjà cette impression de bande de potes qui font les cons. L’humour y est complètement con, mais vraiment très con, toujours bon enfant. Ça n’a la plupart du temps aucun sens, c’est parfois complètement improbable, souvent très naïf, virant tantôt au burlesque, tantôt au potache. On rigole tellement c’est nul, mais volontairement nul, comme par exemple lorsque, lors de la scène du restaurant, un client demande un steak bleu et que lui est amené un steak de couleur bleu (bleu est normalement une des cuissons de la viande rouge pour ceux qui ne le sauraient pas). Les gags sont immatures, à l’image des acteurs eux-mêmes dont on se rend compte, lorsqu’on lit des interviews, qu’ils semblent être restés de grands enfants. Dans leurs films, ils incarnent souvent des personnages inadaptés à la vie sociale, c’est le cas également dans Les Bidasses en Folie. Mais autant la première partie s’en sort avec les honneurs dans le genre comédie légère et débile, autant la seconde partie, lorsqu’ils deviennent bidasses, fonctionne beaucoup moins bien. La faute à des gags bien plus poussifs, et un côté longuet qui se fait vite ressentir. Bien entendu, certaines scènes restent délicieusement hilarantes tant ce qui se passe à l’image est parfois tellement nonsensique que ça en devient improbable. Mais lorsqu’on a vu sa suite, Les Bidasses s’en vont en Guerre (1974), bien meilleure du début à la fin, on ne peut s’empêcher de penser que Les Bidasses en Folie était plus une sorte de brouillon et que le vrai film sur les bidasses est bien cette suite. C’est néanmoins lui qui lancera donc la mode des comédies françaises potaches à base de bidasses avec des titres tels que Les Bidasses aux Grandes Manœuvres (1981), Arrête ton Char Bidasse (1977), Les Bidasses en Vadrouille (1979), Comment se Faire Réformer (1977), Embraye Bidasse…. Ça fume (1978) ou encore la trilogie de la 7ème Compagnie.
Bien qu’il ne fasse pas partie des meilleurs films des Charlots, il ne fait pas non plus partie des plus mauvais. Les Bidasses en Folie reste une comédie sympathique qui ravira malgré tout les grands enfants qui ont grandi avec ces 5 (puis 4, puis 3) trublions.
Critique originale avec images et anecdotes : DarkSideReviews.com