Quatre filles dans le vent.
Les premiers films de Claude Chabrol recèlent de belles pépites, comme l’est Les Bonnes femmes. Pourtant, celui-ci, à la fin de sa vie, n’avait pas l’air de l’apprécier, mais il est à noter que c’est devenu un film culte chez certains cinéphiles. Bien évidemment, c’est très subjectif, mais il ne faut pas nier que ce film a un charme fou.
L’histoire est au fond toute simple ; celle de quatre jeunes femmes, toutes célibataires, et qui rêvent de rencontrer le grand amour ou, par défaut, de rompre l’ennui de leur quotidien en allant s’amuser le soir, ou de se faire draguer par de vieux ringards.
Même si les deux films n’ont guère de rapports, j’aimerais rapprocher Les bonnes femmes des Tricheurs (Marcel Carné), dans le sens où ils se déroulent à la même époque et que ça raconte aussi la jeunesse (ou du moins un certain type) dans les France des années 50.
Sauf qu’ici, Claude Chabrol a l’air plus en phase avec ses acteurs que le fut Carné, et l’une des grandes forces de ce film est qu’il se dégage un naturel rafraîchissant, surtout des quatre filles, qui veulent aimer, mais chacune à leur manière.
D’ailleurs, ce quatuor est composé de Clotilde Joano, Lucile Saint-Simon, Stéphane Audran et Bernadette Laffont, et les quatre femmes marchent très bien ensemble, et la date de sortie du film fait qu’il est assimilé à la nouvelle vague, et on y pense, dans cette énergie, dans cette liberté de filmer qu’a Chabrol. Le film se passant souvent de nuit, on découvre un Paris un peu différent que d’habitude, et il faut souligner la lumière signée Henri Decae, qui est le directeur photo de la plupart des films de Jean-Pierre Melville.
Malgré son côté rigolard, Chabrol, aidé de Paul Gégauff pour le scénario, a un côté cruel, ne serait-ce que par le personnage incarné par Mario David. En effet, ce dernier est un amoureux très timide, et qui observe l’une des quatre femmes sans oser l’aborder. Et celle-ci, l’ayant remarqué, n’ose pas le voir non plus car elle en a un peu peur, car on le voit plusieurs fois rôder autour d’elle ! Je ne veux pas trop en dire, mais Chabrol nous cueille tragiquement sur cette romance naissante…
Dans le casting, on y aperçoit aussi Claude Berri, en jeune soldat cocu, l’inévitable Dominique Zardi dans un petit rôle de chef d’orchestre, Pierre Bertin en patron (et qui joue horriblement faux) et Claude Chabrol lui-même en nageur.
Car oui, j’ai oublié de préciser, mais une partie du film se déroule à la piscine, où la taille haute des maillots pour hommes, et la présence quasi-systématique des monokinis pour les femmes laisse quand même songeur.
Dans l’esprit, on s’approche un peu de Truffaut ou de Godard dans l’esprit libre qu’a Les bonnes femmes, mais je trouve que c’est une bonne petite surprise, même si au fond, ça reste un documentaire sur la jeunesse parisienne des années 50.