Brûler la chandelle par les deux bouts...
Après une bande annonce en béton et l’annonce d’un tel rendez-vous d’acteurs, on ne pouvait plus espérer qu’une confrontation en puissance, avec du sang sur les murs et des sentiments qui sortent des tripes. Il a été assez amusant de voir une famille débarquer avec de jeunes enfants en début de séance, qui se sont carapatés vite de là quand Woody Harrelson s’énerve en tabassant salement sa femme et un automobiliste venu la défendre (non, ce n’était pas la salle, pour Le manoir magique !). Avec une intro de cet acabit, on était déjà aux anges, ça allait être intense, et le Harrelson ne plaisantait pas. S’ensuit la présentation des personnages, à l’ancienne, avec ce goût américain pour la précision du contexte social (quartier pauvre, travail industriel ou comment rendre la rouille belle pour la caméra) et la proximité des protagonistes (le père sous assistance médicale vivant ses derniers moments dans un canapé aux soins de ses fils, les embrouilles naissantes du frère touchant une pension de l’armée où il s’est engagé). On ne rit pas souvent, mais on vit avec ce qui passe à sa portée, sous pression, mais en gardant l’optimisme en tête. Puis l’accident, la prison (d’ailleurs remarquablement traitée, pas besoin de faire une scène choc, une altercation simple entre prisonniers suffit à planter le contexte). Malgré une ellipse trop évidente (quatre ans passent en 10 minutes), on a toujours envie d’y croire, surtout quand on découvre les activités illégales du petit frère pour compenser la maigre pension reçue après ses services en Irak. Puis c’est l’escalade et la confrontation avec Woody Harrelson pour les combats à risque, et le film commence à gagner en ampleur. Indubitablement, le jeu d’acteur est ce qui fait le réalisme du film. Là où Cartel accumulait les saynettes gênantes et les discussions de comptoir, Les brasiers de la colère cherche vraiment des interactions sentimentales entre chaque acteur, lors de chaque échange, et chacun s’en tire avec brio (Bale est mis en avant, mais Harrelson y incarne un méchant marquant, et les performances de Casey Affleck et Willem Dafoe sont simplement impeccables).
Sur ce point là, on tient un casting qui tient pleinement les promesses annoncées. C’est malheureusement sur le scénario que le bas blesse. Passé un certain épisode dans une forêt, le film prend la voie du revange movie bien à l’américaine, avec tous ses clichés et sans la moindre inventivité. Il devient alors d’une prévisibilité regrettable, et peine clairement à conserver le côté brut qui l’habitait. La flamme n’est pas morte, mais elle faiblit. Jusque dans un final complètement prévisible qui n’est même plus réac tant il nous a déjà été ressorti. Avoir vu d’aussi beaux personnages réduits à une histoire aussi simple fait finalement mal. Car on sent le scénariste peu inspiré, qui tenait un bon point de départ mais qui conclut sommairement. Un gâchis certain quand on voit tout le potentiel qui a été déployé en terme d’implication.