Les cadavres ne portant pas de costard (P****n, quel titre), est un pastiche de polar en noir et blanc, suivant les tribulations d'un détective privé, et réalisé par Carl Reiner (un des deux vieux de la bande d'Ocean's 11, l'autre étant Elliott Gould, ayant joué l'un des détectives privés les plus mémorable de l'histoire du cinéma, dans Le Privé, d'Altman). Mais comment se fait-il qu'un tel film soit aussi si méconnu ? Car je le considère, personnellement, comme un chef d'oeuvre d'humour
D'abord, il prévaut par la précision et le sérieux de son pastiche. L'auteur a vu, lu, digéré les codes, les gimmicks, les valeurs et messages des grands films noirs des années 40 et 50, pour accoucher d'une comédie qui, 30 à 40 ans après, retranscrit exactement l'ambiance caractéristique de ces oeuvres, et qui n'aurait presque rien à leur envier. Ce qui lui laisse libre court à des apartés comiques, ponctuelles ou de répétition, qui fonctionnent parfaitement. Il se permet même de mettre en avant les travers de ces films, en premier lieu leur misogynie.
Ensuite, l'utilisation de plans et d'extraits de films d'époques, qui permettent à Steve Martin de croiser James Cagney, Kirk Douglas, Charles Laughton, Vincent Price, et j'en passe, sont inséré au récit et au montage avec un brio époustouflant (je n'étais pas au courant de cela, avant mon visionnage, et cela m'a mis une petite claque à la première scène remontée). Car si on remarque immédiatement le passage du "neuf à l'ancien", aucune scène remontée ne jure, ne semble forcée, car les dialogues et le éléments du plan (décors, accessoires, costumes,...) s'imbriquent parfaitement avec le contre-champ, filmé quelques décennies plus tard. Un tour de force, encore plus pour l'époque.
Enfin, il y a Steve Martin. C'est le premier film dans lequel je le vois (je l'avais vu plusieurs dans des Late Night Show avec son acolyte Martin Short), et j'avoue avoir été très surpris par sa performance. Le noir et blanc, et le costume de détective lui confère un charisme et un sérieux, renforcé par son jeu impeccable, qui nous fait croire à 100% dans son personnage. Là aussi, le sérieux du rôle, permet de renforcer les effets comiques, que ses maladresses et péripéties engendrent, malgré lui ou grâce à lui.
Les cadavres ne portant pas de costard est une immense comédie, qui déborde d'idées incroyable, et concrétise une ambition assez faramineuse. Des comédies comme la Classe Américaine (dans son remontage de scènes de films antérieurs) ou OSS 117 (dans le sérieux avec lequel il aborde le pastiche), n'auraient sûrement jamais existé sans ce film. Ce qui me donne envie de le faire découvrir au plus grand nombre.