Les Cadors a des ambitions louables, on sent dès les premiers plans une volonté de Julien Guetta de faire décoller vers le haut le cinéma comique français. C'est d'ailleurs le cas de la plupart des films auxquels participe Grégoire Ludig. Mais à moins qu'un metteur en scène de talent ne sache tirer profit de son comique (cf. les films de Dupieux), il y a chez lui et son compère du Palmashow David Marsais quelque chose qui ne passe pas au cinéma. Leur comique semble trop lisse, trop gentillet pour porter seul une comédie.
Dans Les Cadors, Ludig est donc confronté à deux autres générations du rire : Jean-Paul Rouve dans le rôle de son frère, compose un beauf bon à rien qui cherche à vivre aux crochets des autres, foutant le bordel dans le quotidien familial de son frangin. Ainsi qu'un Michel Blanc sous exploité dans le rôle d'un leader syndical faisant régner une terreur stalinienne sur le chantier naval où travail le personnage de Ludig.
Si le film arrive à s'adjoindre par instant la sympathie du spectateur en renouant sincèrement avec la France des "beaufs", en l'occurrence les dockers de Normandie, il tombe dans le piège d'essayer de se donner de la noblesse en cherchant à émouvoir. Comme si le comique était une chose si basse qu'elle ne pouvait se suffire à elle même. Cela se ressent également dans la forme, qui est lisse au possible, la photographie est extrêmement léchée. Si le but était de mettre en valeur les milieux populaires, pourquoi donner au film une forme bourgeoise ?
Globalement, aucun comédien ne parvient à transcender l'ensemble (le casting féminin fait tapisserie), surtout pas Jean-Paul Rouve, dont la drôlerie réside dans la nonchalance et qui se voit ici bridé par l'injonction à émouvoir. Jeff Tuche a seulement pris des calmants. Qui plus est le dénouement de son personnage est extrêmement frustrant et convenu. Le scénario dans son ensemble est très consensuel.
Tous cela apparaît finalement comme une tentative ratée de mêler l'humour et l'émotion. Il serait bon un jour d'assumer de faire de la comédie, et de lâcher la bride.