Un ministre israëlien s'installe dans une grande villa jouxtant une plantation de citronniers, et devient vite parano des terroristes qui pourraient profiter du feuillage pour s'approcher de la demeure. Une demande officielle de raser le verger est posée, au grand désarroi de la paysanne modeste palestinienne, qui vit déjà chichement des récoltes de citrons qu'elle produit... Sur fond de guerre éternelle (malheureusement d'actualité...) entre Israël et Palestine, les "trois citrons" deviennent un sujet médiatique, une préoccupation d’État, un conflit national concentré en quelques pépins. On ne dira rien du final, si ce n'est que notre fauteuil de cinéma n'aurait pas été si fortement soudé au plancher, il aurait volé. Le film est réaliste quant à la résolution qu'aurait un tel conflit, ne nous épargne pas avec une happy-end qui nous brosserait dans le sens du poil, préfère nous faire mal au cœur pour mieux dénoncer une guerre qui dure depuis trop longtemps, un rapport de force entre puissant et paysan qui n'a rien d'équilibré, un combat pour la vie (des arbres qui sont peut-être plus vieux que ce ministre...) qui n'intéresse plus si l'argent peut biaiser le verdict. Qui d'autre que Hiam Abbas pouvait apporter toute la dignité nécessaire à ce personnage, jamais montré comme miséreux, mais au contraire plus respectable en un regard de grande Dame (dont elle a le secret) que n'importe quel titre politique... Ici, on ne se trompe pas une seconde sur le personnage qui a l'ascendant moral, intellectuel, honorable, sur l'autre. On pensait naïvement que la femme du ministre allait interférer davantage dans cette folie juridique, mais encore une fois : on n'est pas dans une fiction américaine gorgée de bons sentiments, et on se le rappelle amèrement (acidement ?) dans le final de ce Les Citronniers qui ne nous épargne pas (le dernier plan avec
les arbres massacrés, et la paysanne vouée à la misère mortifère, qui nous lance ce regard transperçant, volontairement long, qui semble sonder notre cœur pour nous demander si tout cela est bien censé, dans un monde moderne...)
. Vraiment, heureusement que notre siège était bien soudé.