Jacques Demy était tombé amoureux des comédies musicales américaines et bien plus encore que Les Parapluies de Cherbourg, Les Demoiselles de Rochefort est un splendide hommage à ce genre. En atteste la présence au casting des deux stars américaines Gene Kelly (Chantons sous la pluie et Un Américain à Paris) et George Chakiris (Bernardo dans West Side Story). C'est en 1996, que la réalisatrice Agnès Varda restaure ce film avec amour, pour le proposer à une nouvelle génération de spectateurs ... dont je faisais parti !
Les Demoiselles de Rochefort est la plus belle des façons pour Jacques Demy, de rendre un vibrant hommage aux comédies musicales américaines des années 50/60, en particulier ceux produits par la MGM, un studio hollywoodien alors à son apogée. Il a même obtenu l'accord de Gene Kelly pour apparaitre dans le film, bien qu'il souhaitait au départ lui confier également la chorégraphie de tous les numéros de danse. Dommage par contre, que cette collaboration arrive si tard dans la carrière de Gene Kelly, car ses 55 ans se font cruellement ressentir et la tentative de créer une romance entre lui et Françoise Dorléac, alors à peine âgée de 24 ans, est assez peu crédible.
Les sœurs jumelles Delphine et Solange Garnier (Catherine Deneuve et Françoise Dorléac) sont au centre de l’histoire. Elles rêvent de Paris et de gloire, l'une étant danseuse et l'autre chanteuse. Il y a aussi leur mère Yvonne Garnier (Danielle Darrieux) qui par le passé a aimé puis perdu son grand amour Simon Dame (Michel Piccoli).
L’intrigue est simple et blindée de facilités scénaristiques, mais le spectateur est conquis par l'énergie déployée par tous les acteurs. Finalement, peu importe si l'intrigue fait en sorte que tout le monde se retrouve à la fin, d'un coup de baguette magique. Il fallait que tous les couples séparés au début du film, finissent par se réunir à la fin et pour arriver à ses fins, Jacques Demy ne lésine pas sur les raccourcis scénaristiques.
Le casting est impeccable. La toute jeune Catherine Deneuve, à peine 21 ans, est la star montante du cinéma français et elle est magnifique. Sa vraie sœur Françoise Dorléac, morte beaucoup trop jeune, est l'autre grand atout dans le film. Catherine Deneuve "la blonde" c'est la beauté froide, tandis que Françoise Dorléac "la brune" c'est l'énergie virevoltante. Quant à Michel Piccoli qui joue Monsieur Dame, le propriétaire du magasin d’instruments de musique, il ne cesse d’aimer Madame Yvonne (la merveilleuse Danielle Darrieux), la mère des jumelles. Gene Kelly fait une apparition surprise et a également contribué aux numéros de danse (mais seulement sur les scènes où il apparait). George Chakiris et Grover Dale forment un duo de forains sympathiques, bien qu'un peu trop effacés à mes yeux (en dehors des numéros de danse). Un jeune Jacques Perrin incarne le marin qui cherche sa femme idéale ... qui ne sera nulle autre que Delphine.
Les Demoiselles de Rochefort c'est aussi le meilleur travail du compositeur Michel Legrand, le plus précieux des collaborateurs de Jacques Demy. La musique de Michel Legrand est mélodieuse, le genre de mélodies qui ne vous quittent plus après les avoir entendu.
Jacques Demy a fait un film qui, même s’il ne plaira pas à tout le monde, est un régal pour nos yeux et nos oreilles. Agnès Varda doit également être créditée pour le documentaire sorti 25 ans après (Les Demoiselles ont eu 25 ans) qui a fait en sorte qu'on oublie pas ce film, mais aussi pour sa contribution dans le travail de restauration de l'œuvre la plus célèbre de son défunt mari.