Les Démons d'argile
6.2
Les Démons d'argile

Long-métrage d'animation de Nuno Beato (2022)

Le festival d’animation d'Annecy est l'occasion, pour tout fan de cinéma d'animation, de croiser des propositions inédites qui sortent de l'ordinaire, et de mettre en avant des artistes qui n'auraient jamais pu avoir un rayonnement international. C'est le cas de Les Démons d'argile de Nuno Beato, un film d'animation portugais qui m'attirait beaucoup par son animation et son speech de base plutôt intriguant. Pour quel résultat ? C'est pas tout à fait ça mais je ne regrette pas du tout ma séance.

Le film brille par beaucoup de chose. Déjà sa créativité visuelle qui est la force majeur du film, et est vraiment recherché. On raconte l'histoire de la déconnexion total d'une personne de bureau qui doit apprendre à se reconnecter avec son village natal dont son défunt grand père en a fracturé le calme et la sérénité. Il est donc intelligent et bienvenue de faire des variation d'animations entre les différents mondes. D'une part le monde moderne et numérique introduit à travers le regard d'un smartphone en animation 3D, et le village dans une stop motion impeccable, mais aussi brièvement le monde de l'information et de la télévision à travers des images en rotoscopie qui crée un univers et des codes qui invitent à l'évasion. Dans les décors aussi, le travail artistique est extrêmement fort car arrivant à résumer l'essentiel en très peu de décors, ce qui illustre le vie "métro, boulot, dodo" du personnage principale, chose qui va changer dans la parti village et campagne où on va pouvoir découvrir de nombreux espaces et décors alors que tout le film se passe dans une maison et un village avec une seul place, trois maisons, et une boulangerie. On sent une volonté de parler à travers l'image, et la réalisation le fait admirablement bien, invitant dans une vrai balade sensoriel et esthétique. Le film sait être convainquant, et pendant toute la première parti du film, mis à part quelques éléments par-ci par-là, je ne regrettait absolument pas mon voyage et j'étais prêt à suivre cette comptable dans un trip sensoriel et spirituel étrange qui laisse rêveur. Le film n'a absolument pas peur et n'est pas timide en effet ou en cadrage. Malgré quelques problèmes d'animation faciale qui font très robotique voire même carrément au rabet avec que deux frames, ce qui donne un résultat assez comique d'animation proche du pixel art utilisé dans un gag, on va avoir des plans extrêmement casse gueule à fleur de personnage, des effets de mise au point pour faire une transition entre deux actions se déroulant dans un même plan... le film regorge d'idée et de bonnes volontés qui se traduisent dans la réalisation, mais absolument pas dans l'écriture.

Je parlais plutôt du film qui s'ouvrait sur une vu au smartphone, c'est dans une scène de bureau avec une employé qui se sent obligé de faire une story pour introduire à coup d’anglicisme se voulant cool et actuel, mais qui sont tellement appuyé qu'ils deviennent maladroit et bête, et ce côté bête voire imbécile va pourrir le visionnage de long, en large et en travers. Le principale problème du film est qu'il ne sait pas à qui parler et/ou que l'on cherche à avoir le cul entre deux chaises mais que cela ne convient pas. On est face à un film qui parle de la reconstruction et du deuil d'un grand père à travers des scènes de rêverie pas franchement tout publique façon Insidious de James Wan, où l'on a des scènes d'horreur très radicaux à coup de statuette d'argile qui se baladent dans la maison et qui pop un peu partout façon Blair Witch Project, et entre ces scènes on peut avoir des scènes de pure imbécilité à coup de "Mais tu savais pas qu'en hiver il fait froid et il gèle ?". Il n'y a rien de pire qu'un film qui sait comprendre son univers et pourrait se contenter d'être un pure trip atmosphérique à la Souvenirs de marnie ou à la colline aux coquelicots, mais qui bâche tout en essayant d'être bas de plafond et parler à un public qui est ni concerné par le propos du film, ni réceptif aux dispositifs qu'on met en oeuvre tout du long. On est quand même face à un film, qui accumule les scènes de pure étrangeté où on met l'accent sur l'anormalité d'un village qui a des choses à cacher, qui accumule les scènes où l'héroïne va accumuler les messages cachés par son grand père, qui accumule les rêves sur le passé du grand père qui donne des indices sur le pourquoi du comment de cette ambiance bizarre et propice au mystère... et qu'au milieu du film se sent obligé de foutre une scène parfaitement inutile où le personnage principale va sortir un tableau en liège pour dire "Hmmm, il y a surement un mystère à résoudre". C'est d'un pathos et d'un ridicule qui rentre presque dans de l'humour qu'aurait un Jim Jarmusch qui critique l'imbécilité de la police dans les films d'horreur, ou l'humour d'un Teddy, avec des personnages du sud ouest totalement à côté de la plaque, qui voient un fait divers violent dans une salle des fêtes, et qui réagissent bêtement en mode "C'est quand même un drame". Il y a un trop grand décalage entre ce que le film propose et ce que le public visé par ce film. On a des scènes purement brillante où on voit une femme planter des légumes et voir les légumes pousser, et à côté on a des scènes purement maladroite et beaucoup trop aceptisé pour le public enfant. On a l'intervention de Chico, le fils de la voisine, qui est insupportable, a le don d'être haïssable en une apparition, n'a aucune forme d'importance à l'histoire, et est forcé dans le récit pour je ne sais quel raison car la voisine sait parfaitement faire le même job, tout en étant moins insupportable et cliché. Le personnage de Chico devient un peu le symbole d'une maladie qui a ravagé un pauvre film d'auteur qui pouvait avoir un grand potentielle, mais qui est rabaissé en un film hybride entre intéressant et imbécilisant. Je reste curieux du prochain film du réalisateur car je sens une personnalité et une créativité folle qui peut exploser dans un second film plus assuré et moins sur la retenu. A voir, mais dommage pour ce film là.

10,25/20

N’hésitez pas à partager votre avis et le défendre, qu'il soit objectif ou non. De mon côté, je le respecterai s'il est en désaccord avec le miens, mais je le respecterai encore plus si vous, de votre côté, vous respectez mon avis.

Youdidi
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le 3 oct. 2022

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