Les Derniers Parisiens est le premier long-métrage des deux têtes pensantes du groupe de rap La Rumeur, Hamé Bourokba et Ekoué Labitey. Ils vont nous emmener, caméra à l'épaule, au cœur de leur lieu de vie, Pigalle et nous permettre de passer un moment avec deux frères ennemis interprétés par Reda Kateb et Slimane Dazi.
Nas (Reda Kateb) vient de sortir de prison. Son frère aîné Arezki (Slimane Dazi), l'a embauché dans son bar, mais la situation ne convient pas à Nas. Il voit plus grand et s'estime propriétaire de ce lieu, comme celui d'un de ses amis Diomede (Yassine Azzouz). L'associé de ce dernier Lucrèce (Willy L'Barge), va lui proposer d'investir dans "son" bar. La relation était déjà tendue entre les deux frères, mais là, elle va devenir explosive face aux ambitions de Nas.
C'est délicat de ne pas aimer ce film. D'abord parce c'est le projet de Hamé Bourokba et Ekoué Labitey, qu'il fût difficile à produire et ce sont battus pour avoir le contrôle total sur leur projet. Ensuite parce qu'il y a un impressionnant casting de gueules et que cela transpire la vérité. Sauf que ça manque de caractère, de dialogues ciselés et d'enjeux dramatiques. C'est étonnant de la part de lyricistes aussi talentueux et pointus, privilégiant le fond à la forme dans leurs albums de rap. Ici, c'est tout le contraire. La forme est séduisante et encourageante pour une première réalisation. Pigalle est dans le flou artistique, la caméra se collant aux personnages passant d'un bar à une épicerie, puis à un salon de beauté sans jamais sortir du quartier. Le fond ne m'a pas intéressé et pourtant, si je vous raconte l'histoire, elle semble captivante.
Deux frères, deux attitudes et deux envies. Arezki en a marre de Paris et veut partir vivre dans le sud avec sa compagne Margot (Mélanie Laurent). Nas aime Pigalle et ne se voit pas ailleurs, malgré la gentrification en cours du quartier. Il clame haut et fort qu'il est ici chez lui. C'est en ce lieu qu'il veut réussir, au détriment de son frère. Son ambition est dévorante et lui confère une confiance inébranlable. Il est entouré de ses amis de galère. Ils font partis du décor et ne semblent pas en mesure de faire autre chose que de tenir les murs du coin. Pourtant, ce sont des hommes de 30/40 ans, mais la réussite les a fui et sont devenus des laissés pour compte. La dernière conversation entre les deux frères résume leurs vécus, leurs mots font écho à leur relation. Le constat est amer, mais il y a toujours une lueur d'espoir pour croire à un avenir radieux, après avoir tutoyer le succès. Ce moment est fort et j'aurai adoré que le film soit dans la même veine.
Reda Kateb et Slimane Dazi sont impeccables. L'exubérance du premier, contraste avec les rancœurs enfouies du second. Nas reste auprès des "siens", Arezki côtoie un autre milieu. Ce sont deux trajectoires différentes, mais les liens du sang ne peuvent être ignorer. Ce superbe duo est accompagnée de Mélanie Laurent, dont on se demandera longtemps ce qu'elle fout là. C'est surement dû à mon mépris envers son jeu d'actrice, mais elle est toujours aussi agaçante. Hamé et Ekoué dénonce la gentrification de Pigalle et prenne une actrice qui représente ce changement. De plus, elle sonne faux, son rire est crispant et elle n'apporte rien à l'histoire. Mouais, je ne peux pas être objectif avec elle. La plupart des autres acteurs sont des non-professionnels, des amis des réalisateurs, des gens de Pigalle et ils ont de la présence. Mais, il y a toujours ce manque de dialogues forts, d'échanges stimulants et cela me laisse sur le bas-côté.
La déception est immense, peut-être que mon attente était trop grande. Une seconde séance s'impose dans quelques années, pour réévaluer l'oeuvre, en espérant que Hamé et Ekoué vont continuer à se balader caméra à l'épaule dans Paris et ailleurs.