La nuit j'aimante
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Le premier film de Louis Garrel est une réelle bonne surprise. A travers l’épopée de deux amis errants dans Paris, le jeune acteur/réalisateur nous livre une œuvre touchante et très plaisante. Clément (Vincent Macaigne), fragile et timide, et Abel (Louis Garrel lui-même), apparemment sûr de lui et manipulateur, tous deux perdus et un peu décalés, croisent le chemin de Mona (Golshifteh Farahani), tout aussi déséquilibrée et quelque peu marginale. Le scénario, inspiré des Caprices de Marianne de Musset, est assez simple : Clément est amoureux de Mona, prisonnière en liberté partielle, qui ne veut/peut plus le voir. Abel veut l’aider à la récupérer, et se crée alors entre eux trois un triangle amoureux.
C’est dans le décalage des personnages avec la société et le reste du monde que réside notre attirance pour ces trois amis : ils sont attachants car déphasés, sympathiques car imparfaits, bouleversants car différents. C’est leur dimension psychologique, et les liens qui se tissent (ou se détissent) visiblement entre eux tout au long du film qui lui donne sa profondeur. Les acteurs sont parfaits dans leurs personnages : Vincent Macaigne en ami soumis et amoureux transi et maladroit ; Golshifteh Farahani en prisonnière apeurée et séductrice hésitante ; et Louis Garrel, qui se donne le beau rôle du loser irrésistible et mystérieux… Il s’amuse d’ailleurs de ce stéréotype qu’il incarne dans presque tous ses films, celui du beau brun ténébreux, ici à travers une réplique de Mona : « Pourquoi tu fais toujours la gueule, tu trouves que ça te donne l’air profond ? ».
Malgré quelques scènes qui manquent peut-être d’originalité, ce film est surprenant, et très agréable visuellement. On y retrouve clairement la patte de Christophe Honoré, qui a co-écrit le scénario et les dialogues : on pourrait y voir un mélange de Dans Paris et des Chansons d’amour, avec le même univers intimiste typiquement français qui sonde et découvre des êtres, des sentiments et des désirs, ponctué de balades dans la capitale, de couple à trois et d’homosexualité latente et hésitante…
Ce film est surtout très appréciable pour son mélange de registres : il mêle moments de douceurs et humour trivial, profondeur de sentiments et comique de situation. C’est l’alternance de passages apaisés avec des crises où la tension monte toujours plus haut, notamment la scène du train raté, qui structure cette œuvre et lui donne une consistance particulière. Le jeune réalisateur est particulièrement doué pour offrir au spectateur des scènes de danse marquantes : Mona/Golshifteh qui se défoule toute seule dans un bar de quartier désert, avec Abel/Louis comme seul spectateur ; ou encore la même dans une boîte de nuit avec une inconnue, cette fois également observée par Clément/Vincent. Ce sont ces images qui à la fois éveillent l’œil du spectateur et ravivent le désir et la fascination des deux hommes pour la jeune fille. C’est cette séduction omniprésente, intentionnelle ou non, qui relie les personnages entre eux, y compris Les Deux Amis.
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le 2 nov. 2015
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