(edit : malgré le scandale incriminant le réalisateur du film, je laisse en l'état ma critique initiale. Libre à vous de la lire ou non...)
Y a des trucs qui me dépassent, comme lorsqu'un réalisateur français nous propose une pépite telle que Les Diables, mais que celle-ci passe totalement inaperçue...
Vous connaissez Vincent Rottiers ? Oui ? Vous connaissez Adèle Haenel ? Aussi ? Vous les trouvez bons ? Et ben figurez-vous que ce que vous avez vu d'eux jusque-là n'est rien en comparaison de ce qu'avait réussi à en tirer Christophe Ruggia, il y a plus de 10 ans déjà... Et rien que pour leurs prestations vous devez voir ce film. J'ai rarement vu deux acteurs aussi habités, alors à cet âge, c'est juste miraculeux.
Ce drame raconte l'histoire d'un frère et d'une soeur d'une dizaine d'années, abandonnés par leurs parents, qui passent leur temps à fuguer des centres spécialisés et des foyers pour retrouver leur maison. Chloé, apparemment autiste, ne cesse de reproduire en mosaïque - et avec une dextérité certaine - la bâtisse à partir des morceaux de verre de différentes couleurs qu'elle trimbale dans des sacs plastique... Son frère Joseph, écorché vif, ne peut pas supporter l'idée d'être séparé d'elle, d'abord parce qu'il la pense capable de retrouver la maison, mais surtout parce qu'elle est et restera, quoi qu'il arrive, sa seule véritable famille, et pourtant... La suite je vous laisse la découvrir, mais mon dieu que c'est puissant, poignant et poétique !
De la magnifique petite comptine du générique au dernier plan extatique du film, le réalisateur fait preuve d'un grand talent de mise en scène, de narration, de psychologie, et s'il se perd un peu parfois dans des facilités scénaristiques (l'arbre abattu sur la sortie, le mec qui n'arrive pas à retenir Joseph dans l'appart, le car-jacking), l'ensemble s'avère tellement édifiant, tellement truffé de scènes sidérantes - souvent violentes -, et rend si bien compte de la détresse de ces deux enfants pour qui tout est déjà perdu et pour qui personne ne peut déjà plus rien, qu'on se retrouve à chaque fois rattrapé par ses émotions...
Il faut dire que le scénario, moralement incorrect, n'est pas du genre à nous faire de fleurs, et pourquoi nous en ferait-il d'ailleurs ? Les diables de souffrance en quête de paradis n'ont que trop peu de chance de l'atteindre un jour, quoique pour un instant peut-être... L'instant d'une fuite et celui d'effleurer la liberté, de retrouver à n'importe quel prix et par n'importe quel moyen ce qu'ils ont perdu : l'innocence et la confiance en l'autre...
Les Diables, c'est avant tout un film d'amour extrême, mais également un film mystérieux et d'une grande sincérité, que j'aimerais tellement donner envie de voir, et ce même en streaming... Parce qu'il faut réparer cette injustice.