C'est tellement simple l'amour...
Les enfants du paradis, c'est simplement l'histoire de "Deux êtres qui s'aiment, se perdent, se retrouvent et se perdent à nouveau".
Simplement.
L'histoire d'un rideau qui se lève. L'histoire de la musique, des mots et des images que ce rideaux cachait jusqu’alors et qui s'entrelacent boulevard du crime. L'histoire de personnages qui se frayent un chemins sur cette avenu, à travers une foule qui, au gré de son humeur, les rencontre et les sépare. Et surtout l'histoire d'un film qui brise ses chaines, rompt l'illusion en vous balançant le récit de l'impossible mais nécessaire amour que prend chacun devant les lèvres rouges de Garance; bien que celles ci (et elle ne le sait pas encore) ne soient destiné qu' à rencontrer celle muette de Baptiste, mime au yeux de fou, aux yeux d'amours et de chagrins.
C'est simplement cela les enfants du paradis. Simplement et pleinement cela. Une histoire vieille comme les Hommes. Une histoire d'avant le mots, mais qui atteint sous le verbe du Poète , la caméra du cinéaste et les notes du musicien une intensité solaire.
Au clair de lune et sous la lumière crue de Carné les personnages s'entrecroisent, s'entrechoquent, se dénudent se libèrent à force de répliques et de silences. On mime, on joue, on s'aime et se désire, on se fuit soi-même à force d'apparences, quand soudain, la pantomime cesse, bascule dans le réel par la seule force d'un être et d'un sentiment.
Alors, pour un moment, la mise en abime dont chacun étaient prisonnier se brisent. Ce n'est plus dans un miroir que l'on croit se trouver ni sur une scène de théâtre -ni même sur l'écran du cinéma- mais dans les yeux de Garance. Autant dire en soi même. Il n'y a plus d'apparence, il n'y a plus de faux semblant, il n'y a plus de film. il n'y a plus rien qu'une grande claque dans la gueule qui vous fait comprendre que vous existez que vous ne rêvez plus.
Car les enfants du paradis c'est surtout cela, le récit d'un réveil ,d'une révélation, d'une révolution intérieure qui anime chaque personnages -et le spectateur- face à la simple Garance et ses simples mots.
Messie aux lèvres ardentes, ouragan simple et tranquille, elle balaye par sa simple présence tout les murs intérieurs, toutes les hypocrisies qui jusqu'alors animés les hommes qu'elle rencontre et qui l'aiment. Lacenaire, le cynique bandit, commettra son dernier crime par amour. Lemaitre, l'acteur et séducteur, pourra enfin arrêter de jouer pour vivre son Othello sur scène. Le Comte, enfin, prisonnier de l'hypocrisie du à son rang ne trouvera de libération que dans la mort.
Car ici, le vrai vainc comme il peut, tant qu'il peut. Non pas comme un vrai de philosophe vaincrait. Mais comme le vrai de tout les jours vainc. A coup de couteau et de regards.
Victoire bien courte. Les apparences ne peuvent que reprendre leurs droits, emportant avec elles l'amour impossible de Baptiste et Garance. Et au loin, dans une foule de carnaval incapable de laisser ceux qui s'aiment s'aimer la silhouette du mime lentement disparaît.
Générique de fin.
La fête est finie. Vous pouvez vous rendormir, vous demandez si ce film n'était qu'un rêve ou si c'est le reste de votre vie que vous aviez rêvé. Vous pouvez retrouver vos amis, vos amants, vos parents, la vie quoi... Et tandis que le monde se remet en mouvement et vous prend dans son sillage, reste en vous le sentiment de s'être vu enfin, droit dans les yeux, et de n'en garder qu'une empreinte, l'empreinte d'un baisé.