Sur le boulevard du crime, vous vous promenez, et tombez amoureux d'une fleur, Garance

Sur le boulevard du crime, vous vous promenez, et tombez amoureux d'une fleur, Garance.
Il y a Baptiste, le mime enfant de la lune, tellement fou d' amour qu'il n'ose cueillir la fleur...
Frédéric Lemaitre, retenez bien ce nom, car un jour il sera un jour en haut de l'affiche, n'a pu résister lui....

Que voulez-vous," Paris est si petit pour ceux qui s'aiment d'un si grand amour"... Ah l'amour joué par Frédéric Lemaitre est délicieuse comédie... qui finit par lasser...
Lacenaire n'aime pas Garance lui, il la désire, il la veut, comme il veut toutes les choses que la société lui refuse, mais un jour son nom aussi sera en haut de l'affiche, et sa tête roulera au sol dans le panier...
Mais tous ceux là peuvent -ils seulement rivaliser avec le Comte Edouard de Montray ? Ils ne sont que petites gens sans importance, quand celui-ci peut offrir à Garance, l' écrin digne de sa beauté.


Elle est libre Garance, comme aucun personnage féminin ne l' avait jamais été auparavant. Elle est libre et elle est simple, elle donne sans arrière-pensée; elle nous bouleverse car elle est Arletty autant qu' Arletty est Garance. Unies dans un même destin tragique, payer le prix de leur liberté. Arletty manqua la grande soirée de première le 9 mars 1945, arrêtée pour avoir été amoureuse d'un officier allemand, Garance accusée d'un crime qu' elle n'a pas commis, se résout à tomber sous la protection du Comte, le prix de sa liberté perdue à jamais.


Il serait injuste d'oublier Nathalie, l' autre grande amoureuse du film, et son abnégation à aimer son Baptiste qu' elle couve du regard comme une mère...


L' Amour sous toutes ses coutures et l' Amour de l' Art, grand film de Cinéma qui rend hommage à ses ancêtres, le Théâtre pour le Verbe, la Pantomime pour le Geste, et aux petites gens qui du haut de leurs grands rêves vous applaudissent depuis le Paradis.


Les Enfants du Paradis est le plus grand film du cinéma français, l'aboutissement de deux décennies d'un art inégalable, irrémédiablement perdu avec le déferlement du cinéma Hollywoodien installé par les terribles accords Blum-Byrnes ( 1946).


Désormais le cinéma français pour survivre, n'aura d'autre salut que la comédie, toujours plus de comédie, ah jouons, rions, vive Louis de Funès et les Bronzés puisque tout est perdu, fors l'honneur.
Et puisque le cinéma américain nous a tout pris, faisons du cinéma avec des rien, bouts de ficelle, saisissons des instants présents, des moments volés, faisons les quatre cent coups, à bout de souffle, l'Amour en fuite... Cinéma déjà contaminé par la brutalité et la fulgurance américaine, à mille lieux de cette grâce et cette élégance si typiquement française que nul n' est parvenu à égaler.


Les enfants du Paradis nous enivre avec la poésie de ses dialogues, nous enchante avec ses décors et ses pantomimes, il faut toujours plus de nouveauté, alors que l' art du coup de pied au cul monsieur, "Il y a toute une gamme, toute une science, tout un style de coups de pied au cul, mais hélas, les traditions se perdent."


Quand on découvre pour la première fois ce film, et pour peu qu'on y mette ce qui nous reste d'âme, la magie de l'ensemble nous enchante.
Quand on le revoit, on coure ce diable risque de trouver que le quatuor infernal derrière tout ça, en a trop fait pour nous éblouir. Car la vie est moins belle sans les cadrages fantastiques d'un cinéaste obsédé par la Perfection ( Marcel Carné), moins belle sans les décors magnifiques de Trauner, elle est moins poétique sans les dialogues d'un Prévert amoureusement mis dans la bouche d'acteurs qu'ils adorent, et la petite musique envoutante de Joseph Kosma.
La Vie est moins que cela.... sans ce Film.


Oui mais que voulez-vous, comme l' avait dit Truffaut, "Je donnerais tous mes films pour avoir fait Les Enfants du paradis".
Vous ne pouvez pas comprendre ce film si vous oubliez qu'il est le produit de la Guerre, son antidote absolu ( Carné tenait à ce que soit le premier film sorti dans la France libérée ).
Pendant la guerre la Vie avait déserté les rues, abandonné les foyers, pour trouver refuge dans les théâtres et les cinémas, alors on peut comprendre que ce quatuor et tous ceux qui ont travaillé à ce film ont mis tous ce qu'ils avaient dans leur cœur et leur âme pour célébrer la Vie à travers le Cinéma.

Créée

le 10 févr. 2013

Modifiée

le 24 févr. 2013

Critique lue 3.6K fois

70 j'aime

15 commentaires

PhyleasFogg

Écrit par

Critique lue 3.6K fois

70
15

D'autres avis sur Les Enfants du paradis

Les Enfants du paradis
Grard-Rocher
10

Critique de Les Enfants du paradis par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Dans Paris en 1828 le Boulevard du Temple est appelé également "Boulevard du crime" et il porte bien ce surnom. Cette artère grouillante comporte quelques théâtres, dont le "Théâtre des Funambules",...

70 j'aime

44

Les Enfants du paradis
PhyleasFogg
10

Sur le boulevard du crime, vous vous promenez, et tombez amoureux d'une fleur, Garance

Sur le boulevard du crime, vous vous promenez, et tombez amoureux d'une fleur, Garance. Il y a Baptiste, le mime enfant de la lune, tellement fou d' amour qu'il n'ose cueillir la fleur... Frédéric...

le 10 févr. 2013

70 j'aime

15

Du même critique

Les Enfants du paradis
PhyleasFogg
10

Sur le boulevard du crime, vous vous promenez, et tombez amoureux d'une fleur, Garance

Sur le boulevard du crime, vous vous promenez, et tombez amoureux d'une fleur, Garance. Il y a Baptiste, le mime enfant de la lune, tellement fou d' amour qu'il n'ose cueillir la fleur... Frédéric...

le 10 févr. 2013

70 j'aime

15

Chantons sous la pluie
PhyleasFogg
10

Make 'em laugh Make 'em laugh Don't you know everyone wants to laugh?

Qui peut résister à "Singing in the rain" ? Qui peut rester hermétique à ce film qui vous entraine, vous endiable, vous charme et à la fin vous terrasse de joie. Je me souviens encore de la stupeur...

le 25 juin 2013

64 j'aime

18

Timbuktu
PhyleasFogg
8

Mea culpa ou savoir accueillir un film pour ce qu'il est.

Longtemps je me suis gardé de rédiger une critique à ce film. Le parti pris du cinéaste, qui de la dérision, à la folle poésie, finissait en mélodrame, échappait en partie à mon entendement. Je l'...

le 21 févr. 2015

58 j'aime

15