Je ne vais pas être très objective, je vous préviens d'avance, vu que ce film tape exactement dans tout ce qui m'exaspère au cinéma, et même parfois dans la vie. Mais une critique est une critique, alors je ne reculerai devant aucun témoignage à charge... Si vous avez adoré, si vous aimez les acteurs impliqués, si vous avez travaillé sur ce projet, brisons-là, ça sera plus sage. Mes excuses anticipées à cette dernière catégorie. Je commencerai par chercher un point positif dans ce naufrage. Je sèche. Pourtant, ça m'a été recommandé par Télérama, c'est forcément bien ! Je plaisante : en matière de films français, la vénérable revue et moi divergeons scrupuleusement. Car il s'agit bien d'un exercice national que cette longue méditation sur la bourgeoisie, d'une part, et les familles dysfonctionnelles de l'autre. J'en veux pour preuve l'interminable liste de films se déroulant dans une résidence cossue le temps d'un été. Certains ont trouvé grâce à mes yeux (si, si, L'homme de ma vie, de Zabou Breitman, ou Comme une image, d'Agnès Jaoui). Je ne suis pas complètement irrécupérable, mais là, j'avoue que ça dépasse ma limite de tolérance au cliché. J'ai beau chercher, je ne trouve rien qui n'en soit pas un. Une pareille accumulation de lieux communs et de caricatures, ça ne peut pas laisser indifférent. Il n'y a qu'à évoquer la scène où la réalisatrice/actrice défend le projet de film de la réalisatrice/actrice qu'elle joue devant une commission qui évalue les chances de financement de son film pour saisir en outre la vanité du jeu de miroir qui nous est proposé. Certains y verront de la malice; j'y vois un manque cruel de recul, voire une complaisance qui frise la provocation. Mais quelle histoire nous raconte-t-on, au juste ? Celle de la construction d'un scénario qui va déboucher sur un vide inquiétant ? La rupture d'une actrice qui se fait détrôner dans le cœur de son bellâtre de mari par une jeunette ? L'égoïsme des riches ? La laideur des gens dans leur ensemble ? En tout cas, c'est plus cette dernière thématique qui m'a sauté aux yeux. Se peut-il que l'autrice déteste tout le monde à ce point ? Se méprise elle-même tout autant ? Franchement, c'est insupportable à suivre, cette affaire, quand on n'est pas psychiatre. En prime, la laideur psychologique est lourdement illustrée par des nudités d'épouvante, qui ne servent pas à grand-chose et dont on se demande pourquoi des comédiens les ont consenties. J'ai fini le film (quand même, j'ai toujours l'espoir qu'un épilogue de génie fasse passer la pilule) au bord de l’écœurement, jurant, mais un peu tard, qu'on ne m'y prendrait plus, et consternée de voir que survit ce genre de déballage embarrassant, qu'on continue par endroit à couvrir d'éloges... bref, je l'ai commencé en tant que cinéphile en quête d'aventure et me voilà misanthrope à tendance dépressive. Un vrai accomplissement artistique, bravo. Je ne dis pas que les thèmes abordés manquent de pertinence (la mesquinerie dans un cadre idyllique, les rapports maîtres/domestiques, l'adoption, la sexualité des vieux, la fracture sociale, les licenciements massifs, ça tire dans tous les sens), mais justement, parce qu'ils auraient tous mérité de plus amples développements, ils finissent par donner l'impression de n'être jamais vraiment traités. C'est pour cela que je penche vers le ratage... Après, hauts les cœurs, il sera toujours possible de faire bien mieux la prochaine fois.

Créée

le 4 déc. 2020

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