Une histoire saisissante
Avec en arrière-plan une Chine bouleversée par la mondialisation et la modernité, la fresque amoureuse des Éternels est sincère et envoûtante. Quiao, interprétée par Zhao Tao, est éperdument amoureuse de Bin, Lia Fan. Sa vie n’a de sens que si celle de son bien aimé en a un. Le film offre le portrait d’une femme courageuse, prête à tout pour atteindre le bonheur. Elle passera par la pègre des communautés mafieuses, la prison, le tumulte des villes pour le trouver. Mais Quiao nage à contre-courant. Celui qu’elle aime poursuit sa course sans se retourner qu’importe les sacrifices de la jeune femme pour lui. Jia Zhang-ke offre la fresque saisissante d’une relation dans laquelle la passion amoureuse de l’un se heurte à la pudeur et la froideur des sentiments de l’autre. Zhao Tao est remarquable par la sincérité de son jeu. Le film nous plonge au cœur de l’embrasement et du déchirement des relations humaines. C’est la vie que le cinéaste chinois nous expose durant ces deux heures, la vie telle qu’elle est entre désordre, confusion et espoir.
Une mutation chinoise et relationnelle
La mutation de la Chine s’immisce dans la relation des deux amants. La Chine moderne, ouverte au commerce transforme les paysages, ravage les prairies, désordonne les repères traditionnels. Les atmosphères contradictoires s’opposent magnifiquement dans le film : les plans d’une immensité vertigineuse d’une ville portuaire en pleine transformation et ses bâtiments au jaune miteux confrontent ceux des petits villages de travailleurs où règne un vert éclatant. La Chine calme et traditionnelle devient tumultueuse et insaisissable. L’espoir naïf du bonheur de jeune femme s’évapore à mesure que la modernité érode la ruralité. Bin, rêveur conquérant de cette immensité moderne voit ses volontés réduites à néant par la brutalité des vagues dans lesquelles il était pris.