On découvre d'abord une pègre qui n'en semble pas forcément une, c'est la fraternité qui est mise en avant ainsi que la loyauté, et les règlements de comptes n'ont pas l'air d'être une solution, signe global d'un système mafieux vu comme une moralité.


Les Éternels permet de suivre plusieurs parcours à la fois, celui d'un pays, d'une évolution, d'une femme ou encore d'un couple, entre 2001 et nos jours. Avec l'histoire de la Chine en arrière-plan, Jia Zhangke propose une fresque historique et dramatique autour d'un couple d'abord, puis d'une femme, en trois temps. Ce sont d'abord eux, puis elle, et eux à nouveau, et il touche, de près ou de loin, aux thématiques de l'amour, l'attachement, la souffrance provoquée par ces deux aspects ou du temps qui passe.


Ce dernier point est particulièrement intéressant, car l'auteur de A Touch of Sin parvient à nous faire ressentir, en trois temps donc, l'évolution, la maturité et la recherche d'un bonheur ou au moins d'une situation stable. On passe de l'insouciance et la jeunesse (les séquences dansantes sont d'une telle justesse) à la maturité qui prend ici une résonance plus triste, le temps a affaibli l'un au point d'être moqué par ceux qu'il dirigeait et fait grandir l'autre qui aura connu de terribles désillusions. Il parvient à tirer une émotion de ces âmes, à nous faire ressentir des sensations parfois contraires pour un même personnage, signe d'une évolution et d'un temps qui minimise le passé pour se concentrer sur le présent.


Alors, tout n'est pas non plus parfait dans Les Éternels et on regrettera surtout un aspect social trop en arrière-plan quand certaines séquences semblent s'étirer inutilement, sans que ça en devienne préjudiciable non plus. La mise en scène de l'auteur n'est pas non plus sans une certaine virtuosité, que ce soit pour capter l'essence des âmes humaines qui passent devant sa caméra ou sublimer de nombreuses séquences avec des mouvements fluides, une approche parfois poétique à l'image du voyage en train de Qiao durant le second acte, d'autres rares fois plus violentes comme la sublime bataille refermant ou presque le premier acte ou belle à l'image de quelques séquences de quotidien particulièrement bien filmées.


Avec Les Éternels Jia Zhangke propose une fresque historique et dramatique sur fond d'Histoire de la Chine, lui permettant de filmer l'évolution de deux âmes humaines à travers le temps, où de nombreux sentiments humains vont se croiser devant sa caméra virtuose.


" Nous ne sommes que des prisonniers sur la planète Terre "

Docteur_Jivago
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes 亞洲路徑 : Voyage à travers le cinéma asiatique, Les meilleurs films de 2018, Les meilleurs films des années 2010 et Les meilleurs films chinois

Créée

le 26 juil. 2020

Critique lue 394 fois

22 j'aime

Docteur_Jivago

Écrit par

Critique lue 394 fois

22

D'autres avis sur Les Éternels

Les Éternels
Moizi
8

C'est grand, c'est beau, c'est fort, le roquefort !

Les éternels est un film magnifique et qui possède sans doute l'un des plus beaux rôles féminin qui soit. Jia Zhangke tourne une nouvelle fois avec sa femme Zhao Tao et il offre un rôle absolument...

le 16 mars 2019

45 j'aime

1

Les Éternels
Velvetman
8

Les affranchis

Article original sur LeMagduciné Alors qu’il part en trombe avec ses faux airs de film de mafia nerveux et sec comme un coup de trique, Les Éternels révèle par la suite toute sa profondeur. Un...

le 1 mars 2019

32 j'aime

1

Les Éternels
Docteur_Jivago
8

Valse en trois temps

On découvre d'abord une pègre qui n'en semble pas forcément une, c'est la fraternité qui est mise en avant ainsi que la loyauté, et les règlements de comptes n'ont pas l'air d'être une solution,...

le 26 juil. 2020

22 j'aime

Du même critique

Gone Girl
Docteur_Jivago
8

American Beauty

D'apparence parfaite, le couple Amy et Nick s'apprête à fêter leurs cinq ans de mariage lorsque Amy disparaît brutalement et mystérieusement et si l'enquête semble accuser Nick, il va tout faire pour...

le 10 oct. 2014

172 j'aime

35

2001 : L'Odyssée de l'espace
Docteur_Jivago
5

Il était une fois l’espace

Tout juste auréolé du succès de Docteur Folamour, Stanley Kubrick se lance dans un projet de science-fiction assez démesuré et très ambitieux, où il fait appel à Arthur C. Clarke qui a écrit la...

le 25 oct. 2014

164 j'aime

47

American Sniper
Docteur_Jivago
8

La mort dans la peau

En mettant en scène la vie de Chris The Legend Kyle, héros en son pays, Clint Eastwood surprend et dresse, par le prisme de celui-ci, le portrait d'un pays entaché par une Guerre...

le 19 févr. 2015

152 j'aime

34