Si il est bien un cinéaste qui nous ouvre une lucarne sur la Chine contemporaine, ses évolutions à marche forcée et ce qui peut apparaître dans les marges qu'elles génères, c'est bien Jiǎ Zhāng-Kē .
Chacun des deux personnages principaux du film peut, dans son comportement et ses trajets de vie, symboliser un des grands éléments sous-jacents et contradictoires du pays.
Bin peut ainsi être vu comme le capitalisme d'état, volonté dominatrice et totalitaire, il est profiteur, opportuniste et sans cœur, sauf pour mendier de l'humanisme une fois qu'il a un peu trop brûlé la chandelle par les deux bouts. Dans ces cas là il revient vers Qiao, que l'on peut voir comme le peuple et/ou les valeurs traditionnelles, communautaires et solidaire de droiture et d'entraide.
Ces deux personnages ont des relations de plus en plus ambivalente au fur et à mesure qu'avance le récit, poursuivant dans une espèce de ballet ayant pour décors les traversées de cette Chine en pleine mutation, croisant toute la multitudes du peuple, dont chaque individu est un mélange savamment dosé de ces deux pôles symboliques.
Le fait de revenir, 12 ans après Still Life, aux Trois gorges s'inscrit dans la même logique, traversant tout son cinéma, de se faire le peintre, ou le témoin, de cette Chine faisant fi de son histoire, détruisant sans trop de scrupule son passé afin d’emboîter le pas d'une modernité promise comme idyllique...