C’est en 1939 que Walsh raconte ces dix années de l’histoire américaine. Dix années folles, hantées par la violence engendrée par la Prohibition. Le film s’ouvre en effet au crépuscule de la première guerre mondiale et se ferme au lendemain du crash de 29. On y suit Eddy (James Cagney, magnifique) vétéran de retour du front, incapable de récupérer son boulot au garage. Après avoir été brièvement chauffeur de taxi (C’est Taxi driver, avant l’heure en fait) Eddy est arrêté pour livraison involontaire d’alcool. Après 45 jours de prison, il ressort, à nouveau au chômage et va profiter de sa rencontre avec la tenancière d’un cabaret pour entrer dans le trafic d’alcool puis peu à peu gravir les échelons du crime tout en s’assurant une reconversion honnête en investissant dans une société de taxis.
Mais le film est aussi l’occasion de raconter trois trajectoires. Il s’ouvre dans les tranchées françaises aux côtés de trois hommes, bientôt démobilisés, qui finiront par se recroiser plus tard. George, un bootlegger arriviste (Humphrey Bogart, qui débute) et Lloyd, un honnête avocat (Jeffrey Lynn) qui s’associeront plus ou moins à Eddy pour fournir l’un des bars très en vogue de New York. Trois trajectoires qui s’entendent sitôt qu’aucun ne déborde, sitôt que les anges de la Prohibition sont de leurs côtés.
Les fantastiques années 20 peut être vu comme le dernier grand film des années 30, sur les gangsters tragiques, dans la lignée de Scarface (Hawks) et Le petit César (LeRoy). Le film impressionne dans son versant documentaire de la dépression, structurant son récit en introduisant les années en tant que marqueurs historiques, avec des anecdotes en tout genre lui permettant d’être, en plus d’un superbe mélodrame, un vrai témoignage des années 20. Grand film. Un modèle du genre. A regarder en prélude d’un autre grand film, sorti quarante-cinq ans plus tard : Il était une fois en Amérique.