Féministes à tout prix

Deuxième long-métrage de Noémie Merlant, après le Mi Ubita mon amour en 2022, les Femmes au balcon s'avère un réquisitoire à charge contre les hommes, dans ce monde post #MeToo. Trois femmes y prétendent se libérer de leur joug, mais est-ce vraiment crédible, même si le scénario, à grands coups de violences sexistes et sexuelles, de questionnements sur le consentement et l'incompréhension du désir féminin, explique que les hommes, égoïstes dans leurs propres plaisirs, semblent l'avoir bien mérité ?

Affichant une ambiance aux couleurs vives, à la Almodovar ou Tarantino, ce film ultra féministe réussit à assembler un mélange de genres contraires convoquant ainsi la comédie, l'horreur, et le fantastique, sans oublier une clin d'œil au polar, sans doute l'aspect le plus drôle.

Ainsi, de leur balcon en forme de QG, Trois Amies excitées et hautes en couleur (rien à voir avec le dernier film d'Emmanuel Mouret !), estimant n'être bien qu'entre elles-mêmes, nous font vivre une sorte de Very Bad Strip sanglant au féminin :

- Elise, cet actrice médiocre qui aspire à de grands rôles et que l'on découvre en Marylin Monroe (allusion évidente à ce fantasme éternel des hommes), sous les traits assumés de Noémie Merlant, la réalisatrice; accrochée à son compagnon Paul d'Amour (!), on la découvre dans une relation tumultueuse, forçant le trait sur le comportement pathétique de celui-ci; Christophe Montenez, sociétaire de la comédie française, a bien du mérite d'incarner ce rôle de composition très dévalorisant;

- Ruby, cette camgirl complètement déjantée et qui veut qu'on l'adule pour son corps qu'elle exhibe à l'envi; incarnée avec justesse et mérite par Souheila Yacoub;

- Nicole, la plus en retenue, seule à ne pas se dénuder, et qui ambitionne d'écrire une belle comédie romantique avec le mystérieux voisin d'en face qui les observe ; incarnée par une Sanda Codreanu très sensible, amie de Noémie Merlant et déjà présente dans Mi Ubita mon amour; elle se demande pendant tout le film pourquoi la réalité n'est pas conforme à ses rêves romanesques; avec Nicole, la réalisatrice trouve sans doute la caution d'une normalité des relations hors de laquelle le film se situe par ailleurs totalement.

Après un début prometteur où un espace de séduction semble s'installer, bien que la violence et le trash annonce d'emblée la couleur, le film devient comme fou et tortueux, dès lors que les 3 copines rencontrent leur voisin énigmatique, incarné par un Lucas Bruno qui a très peu voie au chapitre, sauf dans ses quelques apparitions fantomatiques. Comme si Noémie Merlant et sa co-réalisatrice Céline Sciamma avaient eu du mal à canaliser leur énergie et la façon de transmettre leurs messages.

Et pour répondre à ma première interrogation, le spectateur pourra se demander si cette sorte de farce punk, les femmes exposant leur liberté dans une débauche de nudité tout sauf érotique, façon Femen par moments, permet de dénoncer les oppressions patriarcales, et si cette approche ne se retourne pas finalement contre le film et les femmes, le titre du métrage et son affiche semblant clamer, de manière subliminale ou non, que les femmes ont le choix de décider seules de leurs désirs.

Nul doute que Noémie Merlant est une grande actrice, pour découvrir une grande réalisatrice il faudra patienter un peu; on peut s'interroger aussi sur sa nouvelle propension à s'exhiber nue, troisième fois de suite depuis son apparition seins nus dans Lee Miller et son rôle revisité d'Emmanuelle.