le pèlerinage de Théo

Alfonso Cuarón ! Ce nom m'évoque 2 films. Le premier étant Harry Potter & Le Prisonnier D'Azkaban (le meilleur film de la saga pour beaucoup de critiques), et Gravity, l'un des meilleurs films spatiaux de ses 10 dernières années. Et les Fils de l'Homme ? Disons que c'est le film qui s'est méchamment planté. Alors échec mérité ? Autant dire tout de suite : Pas du tout.

Sur la route d'Alfonso.

J'ai beau retourné le film dans tous les sens, je ne comprends pas son échec. Ce film est vraiment bien conçu et bien fait. Les plans séquences utilisés sont tous très bien amenés et renforce l'identification qu'on a sur Théo et nous place dans une focalisation externe ce qui est assez rare dans ce genre de film (sauf pour les films comme Birdman ou Victoria et les found-foutage). Mieux encore le film permet de nous rendre compte de la progression de l'histoire entre la décadence de la Terre (qui passe d'un cadre idyllique à un cadre plus guerrière) en même temps que de l’imminence de l'accouchement. La photographie est géniale et l'univers très cru (en plus de nous prendre au trip) et est renforcée par une musique impeccable. De simple film d'anticipation, on passe à un grand road-movie dans ce qu'il y a de plus dark. Cela dit la manière dont c'est filmé laisse aussi entrevoir quelques trous et incohérences scénaristiques. Mais cela est pardonnable car on voit ce que Théo voit et donc certains revirements hors champ sont pardonnable (mais je développerai plus tard). Maintenant passons au personnages qui ont tous un symbolique marqué.

Personnages christiques

D'abord nous avons Théo (Clive Owen). Déjà son nom est une allégorie du christianisme. Theo est un dérivé de Teodoros qui signifie Dieu. Cela dit, ici il fait plutôt référence à Saint Théophile, correspondant de Saint Paul pour les Actes des Apôtres. Bref, l'exemple parfait pour être un personnage témoin. Il s'agit d'un ancien activiste politique devenu employé de bureau et qui se retrouve embarqué dans une aventure qui n'a pas choisi et devra protéger Kee.

Julian (Julianne Moore) est à la fois une activiste chef des poissons et l'ex Mme Théo (oui, bonjour la subtilité...). Malgré son peu de temps de présence, elle arrive à montrer le bien-fondé de son combat et par conséquent, convainc Théo de la rejoindre et se montre protectrice envers les personnes qui sont sous ses ordres (même si elle se fait trahir...tiens tiens)

Kee (Claire-Hope Ashitey ) est un personnage à défaut d'être mise en avant, très importante dans le récit. Il s'agit de la première femme enceinte en 18 ans de stérilité. Il y a un aspect très religieux (parallèle plus qu'évident entre la Vierge Marie et Jésus). Cela dit, malgré l'aspect religieux, il s'agit d'une fille africaine banale et qui est attachante comme elle est banale et ne se prend pas pour une personne hautaine ou importante (renforcé par le fait que le premier nom qu'elle à choisi pour son bébé n'était pas très adequat). Elle finira par être reconnaissante des efforts de Théo pour la protéger elle et son bébé.

Luke (Chiwetel Ejiofor) est un antagoniste au motivation plus que douteuse. Voulant se servir de l'organisation et de Kee comme outil de propagande contre le pouvoir en place, il va mener paradoxalement les poissons à leur perte, mais finira par se battre pour une cause plus juste

Il me fait un peu penser à Judas dans son cheminement.

Et ... J'ai envie de m'arrêter sur l'organisation des Poissons. Pourquoi ce nom ? Toujours dans cette logique d'allégorie religieuse, le poisson est aussi le symbole du christianisme. En effet cette organisation qui est là pour renverser le pouvoir en place par des moyens terroristes. Elle possède l'élément qui va tout changer mais paradoxalement, va dévier de son but premier. L'enterrement sera parachevé par la mort de Julian ce qui fera d'elle d'une organisation sensée être le symbole de la liberté une organisation terroriste ne différant pas du régime dictatorial qu'elle combat.

Jasper (Michael Caine) est... Michael Caine. Bref, un allié de Théo avec le fun qui va avec. Il se montre pratiquement paternelle avec lui donnant sa vie pour lui. Tout l'inverse de son ami Syd (Peter Mullan) qui est plus un homme plus imprévisible au vu de la situation.

Les autres personnages ne sont pas assez marquants et sont plus secondaires même s'il permettent d'avancer l'histoire (je pense évidemment à Patric et Miriam)

En route

L'histoire est simple. Un homme qui se retrouve garde du corp du seul espoir de l'humanité. Mais elle est bien raconté est prenante. La réalisation permet une multitude de symbolique et l'utilisation du plan-séquence fait qu'on est aussi acteur de l'histoire. On voit le monde changer à travers les yeux de Théo, on est même investi dans l'histoire. Malgré la connotation très catholique de tout le film, il nous fait apprécié le sens du message, sans que ce soit trop envahissant. Même le titre qui est une référence à la Genèse (on parle des Fils des l'hommes en opposition aux Fils de Dieu) Du coup on est investi et on s’identifie bien au personnage. Même le but du pèlerinage possède des références liées au Christ. Et là je suis obligé de spoiler

Cette dernière séquence est vraiment bien car elle prend à contre pied ce que l'on sait de Jésus. Nous savons que dans plusieurs de ses prédications, il aimait le faire depuis une barque devant une foule immense. Là Théo meurt dans une barque sans aucun témoin. Jésus est né dans une étable (ou une grotte) alors qu'il n'y avait personne, l'enfant de Kee est né en pleine zone de guerre. C'est quand même amusant que le réalisateur prenne le contre-pied de manière si intelligente. Enfin, la mort de Théo sonne aussi la fin du film. Nous avons perdu notre témoin, donc on a plus besoin de connaître le sort de Kee (qui de tout façon est arrivé à bon port). La seule chose que je pourrai reprocher au film, c'est que la focalisation laisse quand même certaines maladresses du au faite que les personnages externes ont une évolution hors champ (comme Luke justement). Mais bon c'est léger.

Très bon film d'anticipation

Le film est excellent et la critique ne s'y est pas trompée. Ce qui n'est pas le cas du public qui a boudé ce film et qui a été un échec commercial. Oh monde cruel. Bref, il s'agit d'un film qu'il est bon de redécouvrir.

Version fun de la critique ici