Un délice, ces Frissons de l'Angoisse. Surtout en version restaurée et en salle. Behind ne pouvait pas passer à côté. Ah non. Pas question.
Et il fait son petit effet, Dario, même si parfois, le poids des années se fait ressentir. Pour le meilleur, car à l'époque, l'ambiance et l'atmosphère étaient des données essentielles. Mais aussi sur des petits coups de moins bien, quand l'enquête prend, en quelques rares occasions, une allure un poil nonchalante mais cependant hypnotique. Puis on réalise que finalement, le film épouse en presque totalité le point de vue de son enquêteur, David Hemmings, embarqué dans une énigme en morceaux où tout est aussi question d'image et de reflets, aussi bien mentaux que purement graphiques, ou encore de souvenirs parasités et refoulés.
Sa quête d'interprétation est ainsi marquée par l'échec : il ne semble ne jamais aller jusqu'au bout, comme en témoigne la révélation d'un élément clé de l'intrigue dont son interprétation est irrémédiablement faussée. Et il suffit pour lui de quitter les lieux pour que la révélation, en direction du spectateur, soit totale. Les images du monde de Dario sont donc constamment morcelées, histoire de déstabiliser son audience ou encore d'instiller un malaise palpable. En résultent des plans superbes, comme cet automate à la tête fendue des plus dérangeants et bizarres, vu à travers les yeux de l'une des futures victimes du bourreau sur fond de musique totalement décalée avec la tension ressentie.
Ce tueur-là est à la fois typique du genre giallo, avec ses gants noirs cadrés du plus près possible, son attirance pour le meurtre graphique et son allure fantomatique, mais préfigure aussi, comme me le soufflait l'ami Hunk, une certaine conception du slasher, encore une question de point de vue, tout en faisant le mobile des crimes non sur la psychose dont est animée l'assassin, mais sur sa propension à dessouder tous ceux qui seraient en mesure de le démasquer.
Drôle de film que ces Frissons de l'Angoisse : tendu, hypnotique, porté sur l'image magnifique et le décalage constant entre ses différents éléments, goût pour un sang rouge profond, tout en irriguant son intrigue d'une histoire d'amour qui n'a pas l'air d'y toucher, ainsi que de figures et de situations qui ne manqueront pas de provoquer un sourire que le masqué croyait totalement étranger au giallo. Jusqu'à un renversement qui voit la femme prendre la place de l'homme.
Le tout en forme de sommet d'un genre ultra codifié en forme de rêve au frontières d'un fantastique diffus et indéfinissable aux accents thriller, précipitant son spectateur dans un abime assez délicieux.
Le restauration a forcément du bon.
Behind_the_Mask, non mais giallo quoi !?