Amorcé par un viol particulièrement réaliste, à une époque où l'affaire Tonglet-Castellano secoue l'opinion publique, le très singulier Improvvisamente una sera... un amore (titre d'exploitation italien au charme désuet) nous plonge dans un récit troublant où une coach sportive, incarnée par Virna Lisi, succombe à celui qui l'a pourtant violée, un pilote automobile à la virilité feutrée, Maurice Ronet, en parfait "guy next door".
D'abord ancré dans les codes du rape and revenge, le film semble promettre la trajectoire revancharde définitive au genre, mais il s'en écarte peu à peu pour emprunter un sentier plus tortueux : celui du romantisme toxique en dentelle. La mise en scène de Gobbi, naturaliste, capte l'essence terne et crue d’un Paris XVIe tout en offrant, durant la deuxième partie, des échappées sur les falaises d’Étretat.
Une étrange dynamique s’installera, où celle qui fut victime semble peu à peu prendre l’ascendant sur celui qui fut son agresseur. Mais cette domination, loin de libérer, glisse vers une relation de plus en plus dérangeante, où Ronet, dans une scène presque grotesque, finit par jeter des galets sur son amante, comme un geste ultime de frustration. Sa soumission finale, à genoux sous la main compatissante de celle qu'il a violentée, achève de transformer cette œuvre en une réflexion troublante sur le romantisme hétérosexuel de cette époque, imprégné des reliquats tenaces d'une culture du viol. Je ne me prononcerais pas trop sur la valeur du film, mais l'expression "cringe" ne serait pas injustifiée !