Soutenu par le scénario de Pasolini adapté de son propre livre (où l'on retrouve des aspects autobiographiques comme les petits larcins, la vie folle et nocturne, les beaux hommes, la tentation du mal, ...), magnifié par la photographie de Nannuzzi (les corps splendides, les jeux de miroir, les personnages dispersés dans l'espace ou réunis dans un seul cadre, …), habité par les prestations d'une belle brochette d'acteurs et surtout d'actrices et accompagné par la musique toujours aussi jazzy de Piccioni, La notte brava raconte les délits puis la nuit endiablée d'un groupe de romains désœuvrés et encanaillés, petites frappes immorales vivant du moment présent.
Deux putains et deux criminels. La langue du peuple. Trois fusils. Un trottoir hors les murs romains. Voilà le mariage improbable que célèbre l'introduction du film. Puis, au fil des lieux (soulignons les très bonnes trouvailles comme l'intérieur endeuillé d'une famille de la pègre, les champs traversés par le jet de l'arrosage automatique, les nombreux terrains vagues, …), des rencontres inattendues permettant d'embrasser un spectre assez large de la société romaine de l'époque (les trois blondinets beau gosse friqués, la sœur de celui-ci superbe dans son lit, les parents et les gosses de la dernière fille, …) et des enchaînements d'actions, le récit progresse, fait marche arrière, prend un virage à 180 degrés, s'arrête dans un terrain vague, repart, évite les patrouilles de flic, va boire des verres dans des bars souterrains puis dans des restaurants de luxe, provoque un esclandre chez les bourgeois puis vient s'échouer dans le silence de la nuit. Jusqu'au plan final (et initial) de ce billet froissé et sale jeté au milieu du ruisseau d'ordures. Une sacrée nuit en somme.