De ce jour, je me mis à étudier intensément la stratégie
Dans l’après 1968, il y eut comme une pose. Contrairement à ce que prétendent certains aujourd’hui, le système avait pris une sérieuse claque. Le consumérisme béat des années 60 et son aspiration à une vie de petits bourgeois repus et décervelés avaient subitement cessé de faire illusion et d’être attractif pour une grande part de la jeunesse de l’époque.
La domination spectaculaire-marchande lâcha donc du leste et pendant quelques brèves années, il y eut comme un courant d’air frais. L’espace était plus ouvert, la pression moins forte et la notion de liberté sembla reprendre quelque signification. Et puis les campagnes étaient encore belles et avenantes et n’avaient pas encore été totalement ravagées par l’industrie agro-alimentaire et les zones pavillonnaires. Les villes offraient encore quelques promesses de rencontre, de jeu et de partage de l’espace public. Bien sûr, il fallait aussi trouver quelque moyen de « gagner » sa vie mais lâcher un boulot et en trouver un autre ultérieurement ne posaient pas vraiment de problème ; et le gouvernement était même prêt à payer les chômeurs pour qu’ils se tiennent tranquilles. Existait aussi alors la conscience que pour que la rue soit à nous, il suffisait de s’en emparer.
Puis un beau jour arriva au cinéma, comme incidemment « Who’ll stop the rain » (Guerriers de l’enfer) et fort étrangement, de ce jour, il fallut bien conclure que la fête était terminée.
La domination avait rebattu les cartes et l’ignominie du « marché » reprit ses droits.
Le chacun pour soi devenait la règle, le règne de l’argent s’affirmait comme unique horizon, la pourriture marchande repoussait l’homme hors de l’histoire.
La dynamique de la musique de Creedence Clearwater Revival ne suffisait plus et Nick Nolte à qui, pourtant, l’on s’identifiait pleinement, ne faisait décidément pas assez peur à ses ennemis. De ce jour, je me mis à étudier intensément la stratégie.
« Les guerriers de l’enfer » est un film tout à fait inoubliable.