Les Hirondelles de Kaboul : joli titre pour dépeindre l'horreur et le joug du fanatisme religieux. Tout comme l'oeuvre choisit un graphisme chatoyant et des aquarelles, rappelant la technique du fabuleux Ernest et Célestine, afin d'animer les ruines et les décombres, tant matérielles que morales.
Il y avait sans doute à redouter l'emploi du mièvre et du simplisme afin de dépeindre le quotidien afghan, la tarte à la crème de la violence édulcorée pour éviter de trop choquer. Mais le film évite la plupart du temps ces écueils. Pas de rafales de kalachnikov, certainement trop démonstratives, ni de coups de fouet répétés pour punir les mécréants.
Non. A la place, une lapidation et une exécution publique. Un supplice aussi, bien plus anodin en apparence : celui de la chaleur éprouvée sous une burqa transpirant de sueur. Et la colère qui monte de ne pouvoir l'exprimer. Là réside sans doute la véritable définition du mot prison, comme le montre l'oeuvre par l'intermédiaire de la belle et incandescente Zunaira, esprit libre enfermé dans la tradition présentée comme religieuse.
Dans un régime qui asservit, qui avilit la femme et qui n'a de cesse de répéter qu'un homme ne lui doit rien. Au point de parfois y croire, comme Atiq, las, impuissant, ou Mohsen qui, tous deux, effacent peu à peu la différence entre le compromis et la compromission. Vivent avec un conflit auxquels ils ressemblent peu à peu.
Tandis que Zunaira porte avec un optimisme touchant la croyance en l'avenir et cette jeunesse à qui rien ne saurait être longtemps interdit. Jusqu'à cet enfermement et jusqu'à ce que son geôlier croise son regard de biche orientale.
La bascule du récit se trouve là : un seul acte qui va changer les vies de chaque personnage brisé, avec cette indomptable beauté comme épicentre. Et s'il est affirmé qu'à Kaboul, aucun soleil ne résiste à la nuit, quelques âmes changent et s'émeuvent. Quelques volontés se rendent compte qu'il existe quand même, entre les décombres et la violence, quelque chose à sauver afin de donner un semblant d'avenir à un pays à genoux.
Tout cela fait des Hirondelles de Kaboul un film touchant et courageux, une ode à la volonté de changer et de refuser l'injustice. Une forme de résistance qui grandit en silence et amenant à conjuguer l'amour au sacrifice. Et même si le film dévoile bien trop vite son pot aux roses, désamorçant une partie de sa charge émotionnelle qui aurait pu être totale, il conserve une certaine sensibilité et une rare délicatesse qui resteront en mémoire longtemps après le générique final.
Des Hirondelles qui s'envolent donc à tire d'aile pour célébrer, entre la mélancolie et les décombres, l'éclosion d'une fleur aussi obstinée que fragile : l'humanité.
Behind_the_Mask, une hirondelle a fait le printemps.