"Chalet sympa, voisins bruyants" - 2 étoiles

Rebooter la "licence" The Strangers, voilà une idée saugrenue. Un premier film avec autant de qualités que de défauts, et au final juste mouais. Trois petits éléments peuvent pourtant nous donner de l'espoir : Déjà le film n'est pas un unitaire mais une trilogie déjà filmée, ensuite elle est scénarisée par le réalisateur du film originel et enfin, elle compte Renny Harlin aux commandes.

Renny Harlin, c'est un vieux de la vieille. Un de ces faiseurs apparemment increvables d'Hollywood qui a traversé les décennies avec un nombre incalculable de projets foireux mais quelques productions sympathiques. Pas un réalisateur avec une forte personnalité, mais un technicien compétent et expérimenté. On pouvait donc a minima attendre un film divertissant, et c'est ce qu'on a eu.

La comparaison avec le film d'origine est à la fois tentante et un peu vaine. Oui, c'est peu ou prou le même film, avec le même déroulé et le même point de chute; oui, il y a encore une petite confusion entre Slasher et film d'horreur plus "réaliste"; oui, le duo principal n'est pas spécialement attachant même si la comédienne principale s'en sort clairement mieux que son homologue masculin (visiblement une constante de cette "licence");...

Mais il faut quand même souligner que le film a fait certains efforts pour se différencier de son ainé. La mise en scène des antagonistes dans ce dernier se voulait empruntée au Slasher type Halloween de Carpenter, à savoir faire de ces tueurs des entités spectrales capables d'être partout à la fois et de toujours prendre leurs proies par surprise. Pour ce film, Harlin emprunte plutôt au Halloween de David Gordon Green, dans lequel Micheal Myers était beaucoup plus présent face caméra, au point où celle-ci le suivait carrément pendant ses scènes de meurtre plutôt que d'être du point de vue de ses victimes. Ici, les trois psychopathes sont moins fantomatiques et beaucoup plus présents à l'écran, ils sont assumés comme des êtres humains normaux et non plus comme des êtres presque surnaturels, ce qui étonnamment a eu pour effet de me les rendre plus attachants. En tout cas ils me sont bien plus sympathiques que ces deux citadins méprisants !

Parce que le premier film avait la volonté de nous montrer un couple au bord de la rupture, et donc fragilisé autant de l'intérieur que par les menaces extérieures. C'était peu voire pas du tout exploité, mais il y avait au moins ça. Là, nos deux lurons sont principalement caractérisés par le fait que ce sont deux newyorkais qui débarquent dans la province et se retrouvent dépassés par ce choc culturel. Ohlala, ils ont même pas de menu végétarien ! Ohlala, les gens du coin sont trop rustres ! Ohlala, les garagistes ils ont une tête bizarre ! Ohlala, c'est une bande de péquenauds arriérés à fond sur la religion ! D'ailleurs c'est un peu cocasse de mépriser des provinciaux et de les traiter d'arriérés pour derrière nous mettre en scène un duo principal dont la finalité est de savoir si oui ou non ils vont se marier. Je sais que le cinéma d'horreur américain de ces dernières années vire de plus en plus réac', mais quand même, faites un effort de cohérence dans vos discours de vieux cons !

Mais bref, ça n'est jamais qu'un détail dans ce film d'horreur qui reprend peu ou prou la même mise en scène que l'original, à savoir une succession de scènes de tension parachevée par un jumpscare. Autant voir ça dans un film de 2008, ça a son petit charme désuet, autant le voir après 15 ans d'évolution de l'épouvante américaine, c'est plus embarrassant. On est littéralement bloqués dans un film à jumpscares façon 2008. D'accord, le réalisateur a la politesse de varier un peu notamment avec quelques idées de plans sympas (le cadrage du piano avec le miroir au-dessus est d'une simplicité très élégante), mais dans les faits ont a juste une succession de jumpscares assez prévisibles.

Maintenant vient fatalement la question : Y-a-t-il du potentiel pour une trilogie ? Dur à dire. Les antagonistes sont plutôt sympas, mais il n'y a pas vraiment d'univers construit, et même si la fin semble vouloir créer la Laurie Strode de cette licence, je peine à dire si l'on peut vraiment aller quelque part. Dans l'idée, une trilogie racontant à chaque fois une nuit d'horreur différente avec notre trio au centre, ça serait déjà très bien. Mais vouloir raconter une histoire complète en trois parties ? Plus casse-gueule, surtout si c'est pour nous refaire une Halloween de Gordon Green avec la fin qu'on lui connait.

Mais on verra bien. Ce premier opus a au moins eu le mérite de me rendre curieux de la suite.

Au passage, si voulez un vrai bon film sur des intrus, voyez The Intruder de Roger Corman, c'est un chef-d’œuvre, l'horreur n'a jamais été aussi réaliste.