janv 2011:

Pour son premier long métrage, Valerio Zurlini s'attache à décrire les pièges dans lesquels les êtres s'échinent à se faire prendre. Antonio Cifariello est un jeune homme écervelé, disons le trivialement : il pense avec sa bite. Aussi passe-t-il son temps à jongler avec les femmes. Les yeux plus gros que le ventre, incapable de rompre une relation ni d'en laisser échapper une nouvelle, il finit par compter cinq jeunes femmes dans son petit "harem".

Zurlini montre très bien le fonctionnement de ce séducteur, la manière dont il manipule ses victimes. Mais même si les femmes sont les jouets de persuasions faite de mille mensonges et chantages, elles ne peuvent s'empêcher de tomber amoureuse. Même quand elles découvrent le poteau rose, elles restent encore malgré elles sous le charme.

On ne peut pas parler pour autant de "petit manuel de la drague", la boulimie de Bob (Cifariello) constituant une entreprise de démolition. S'autodétruisant à petit feu, par son insatiabilité, le pauvre fait figure du parfait imbécile, mais d'une immaturité presque attendrissante, en tout cas assez comique. Finalement, le film est assez proche de ces comédies acides, comme "Les monstres" de Risi, sauf qu'ici le sketch dure tout le long du film sur un seul personnage.

Les actrices, toute d'une grande beauté, ce qui n'est pas un scoop avec Zurlini, et composent des personnages bien différents, de la jeune femme passionnée et naïve à l'aventurière vamp, dominatrice et indépendante. A ce propos, le scénario de Leonardo Benvenuti et Piero De Bernardi, d'après le roman de Vasco Pratolini, ménage des espaces bien distincts entre elles et propose de la sorte un kaléidoscope de la femme italienne des années 50.

De plus, la photographie de Gianni Di Venanzo, le futur directeur de la photographie sur "8 1/2", "Main basse sur la ville", L'éclipse" ou "Juliette des esprits", accentue les angles et les reliefs avec une rare élégance. Cela donne aux accents des personnages une passion plus émouvante encore. Et d'autre part, le plaisir visuel que l'on prend à regarder ce film n'en est que plus intense.

On peut donc dire que le film est drôle et beau à la fois. C'est toujours rassurant de découvrir que le metteur en scène prenne autant de soin à filmer son récit : ce n'est pas juste une histoire, c'est du cinéma.
Alligator
7
Écrit par

Créée

le 16 avr. 2013

Critique lue 592 fois

3 j'aime

1 commentaire

Alligator

Écrit par

Critique lue 592 fois

3
1

D'autres avis sur Les Jeunes filles de San Frediano

Les Jeunes filles de San Frediano
Ronny1
5

Un sexe en guise de cerveau

Zurlini a vingt huit ans lorsqu’il réalise son premier film inspiré du roman de Vasco Pratolini. Le scénario découpe distinctement l’univers et la personnalité des cinq femmes victimes consentante,...

le 23 nov. 2023

1 j'aime

Les Jeunes filles de San Frediano
Cinephile-doux
7

Séducteur en chéries

Il est toujours émouvant de découvrir, enfin, le premier film d'un cinéaste aimé. Atypique, cette oeuvre dans la carrière de Zurlini, hésitant constamment entre la comédie, le drame et la chronique...

le 10 sept. 2019

1 j'aime

Du même critique

Cuisine et Dépendances
Alligator
9

Critique de Cuisine et Dépendances par Alligator

Pendant très longtemps, j'ai débordé d'enthousiasme pour ce film. J'ai toujours beaucoup d'estime pour lui. Mais je crois savoir ce qui m'a tellement plu jadis et qui, aujourd'hui, paraît un peu plus...

le 22 juin 2015

55 j'aime

3

The Handmaid's Tale : La Servante écarlate
Alligator
5

Critique de The Handmaid's Tale : La Servante écarlate par Alligator

Très excité par le sujet et intrigué par le succès aux Emmy Awards, j’avais hâte de découvrir cette série. Malheureusement, je suis très déçu par la mise en scène et par la scénarisation. Assez...

le 22 nov. 2017

54 j'aime

16

Holy Motors
Alligator
3

Critique de Holy Motors par Alligator

août 2012: "Holly motors fuck!", ai-je envie de dire en sortant de la salle. Curieux : quand j'en suis sorti j'ai trouvé la rue dans la pénombre, sans un seul lampadaire réconfortant, un peu comme...

le 20 avr. 2013

53 j'aime

16