Les Lueurs d'Aden
6.7
Les Lueurs d'Aden

Film de Amr Gamal (2023)

[Publiée le 31 Janvier 2024 sur Un Certain Cinéma]


Les Lueurs d’Aden fait partie de ces films dont l’autour semble tout aussi intéressant que l’œuvre en elle-même. Ce n’est pas une excuse, ni une béquille, bien au contraire, c’est une connaissance particulièrement précieuse, un outil de compréhension des enjeux d’une œuvre dont l’origine surprend, le Yémen, pays dont la production cinématographique serait inexistante sans la présence de Amr Gamal et de ses proches.


Si le cinéaste ne se cache pas d’avoir travaillé à la télévision malgré une aversion pour celle-ci, le personnage du père, Ahmed, au sein de ce récit s’y refuse nettement, du moins en ce qui concerne le domaine privé. Néanmoins, la véritable héroïne du film, ici, est Isra’a, une femme enceinte piégée entre une réalité sociale qui ne lui permet d’avoir un quatrième enfant et une conviction religieuse assez forte pour la rendre rétissante à l’idée d’avorter.


C’est avec une très grande justesse, c’est-à-dire avec la qualité de n’avoir aucun jugement négatif sur quiconque, que le cinéaste Amr Gamal filme ce dilemme, les différents niveaux de croyance perdent le couple du récit dans leurs choix et la presque survie permanente les pousse à bout de leurs forces pour réussir à offrir une vie convenable à leurs trois enfants. La caméra du réalisateur capte cette générosité qui traverse les amis et la famille, tout en mettant la lumière sur les fissures que cette possibilité, ou non, de l’avortement provoque sur le couple.


La réussite de l’œuvre passe aussi par cette volonté presque documentaire de rendre compte de la vie à Aden, le cadre souvent fixe et l’amateurisme des comédiens laissent place à un sentiment d’authenticité, à une impression de réel – au sens documentaire du terme. Les Lueurs d’Aden remplit dans cette optique cette mission première de film témoin d’une ville, d'enjeux sociaux mais aussi religieux, à échelle commune comme individuelle, le tout avec un immense respect pour chaque personnage, indépendamment de ses pensées.


Si la mise en scène n’est en rien révolutionnaire, il ne faut pour autant oublier sa capacité à chercher presque toujours très justement le plan qui documente autant l’aspect fiction de l’œuvre qu’il fictionnalise son aspect documentaire.

SKP
7
Écrit par

Créée

le 19 août 2024

Critique lue 14 fois

1 j'aime

Enzo

Écrit par

Critique lue 14 fois

1

D'autres avis sur Les Lueurs d'Aden

Les Lueurs d'Aden
Propppane
10

Critique de Les Lueurs d'Aden par Propppane

Peut-être que nous serons heureux le jour où nous aurons de l'argent.Peut-être que nous serons nous-mêmes le jour où nous donnerons les moyens aux hommes d'être des hommes.Les lueurs d'un avenir plus...

le 6 févr. 2024

1 j'aime

Les Lueurs d'Aden
SKP
7

Critique de Les Lueurs d'Aden par Enzo

[Publiée le 31 Janvier 2024 sur Un Certain Cinéma]Les Lueurs d’Aden fait partie de ces films dont l’autour semble tout aussi intéressant que l’œuvre en elle-même. Ce n’est pas une excuse, ni une...

Par

le 19 août 2024

1 j'aime

Les Lueurs d'Aden
oeildetigre
10

Le Yémen aujourd'hui, l’Europe de demain?

Un très beau casting et une réalisation fine et sensible. On sent parfaitement et sans effets inutiles l’ambiance pesante de la vie quotidienne. Les états d’âme des uns et des autres sont aussi très...

le 19 avr. 2024

Du même critique

Le Cheval de Turin
SKP
10

La Fin du Monde selon Béla Tarr

[Publiée le 11 Novembre 2023 sur Un Certain Cinéma]A la question « Qu’est-ce que la fin du monde ? », il ne serait pas surprenant d’entendre de nombreux films être cités, ils seront hollywoodiens,...

Par

le 19 août 2024

1 j'aime

Chelsea Girls
SKP
10

Critique de Chelsea Girls par Enzo

[Publiée le 14 Janvier 2023 sur Un Certain Cinéma]WARHOL, appellation d’origine associée au Pop Art, sans pour autant savoir de quoi ou de qui il est question. Néanmoins, Warhol n’est pas reconnu,...

Par

le 19 août 2024

1 j'aime

1