"Les malheurs de Sophie", ce titre sonne pour moi et pour beaucoup de ma génération comme ce terrible dessin animé qui passait sur France 3. Terrible car s'il était drôle et que nous l'aimions beaucoup il n'en narrait pas moins quantité de drames pour la malheureuse Sophie et son entourage, au delà de ses simples bêtises.
Ce film de 1981 peut-il être si mémorable ?
"Les malheurs de Sophie" s'ouvre avec la chanson du même titre par Chantale Goya, quelques plans de l'habitation familiale, des jardins, des gens au service de la famille puis nous retrouvons très vite l'incarnation du personnage principal dans la cuisine, prête à faire ses premières bêtises. Puis les suivantes. Puis d'autres encore... Le long métrage fait fi d'un quelconque fil rouge pour son scénario et n'a pour seule ambition que de montrer les bêtises les plus amusantes de la gamine éponyme au cours d'une heure et demie. Point question donc d'évoquer ses épisodes de vie les plus douloureux et le film se présente davantage comme un film à sketch enfantin témoignant de l'esprit d'inventions des enfants les plus turbulents.
La direction des acteurs fait très théâtrale, chacun récitant un texte qui semble être écrit au plus proche des œuvres originales, quitte à en perdre un peu en naturel. Pour autant la jeune actrice qui campe Sophie, avec sa bouille malicieuse et boudeuse, fonctionne tout à fait et se révèle très attachante. Son cousin Paul n'est d'ailleurs pas en reste et même si leurs échanges sont étonnamment formulés et classiques, leur relation est quant à elle très touchante.
Deux petites bouilles qui semblent donc essayer de s'amuser dans un univers et une mise en scène très rigides, parfois trop.
Il faudrait que je revoie ce fameux dessin animé, plus encore que je lise les bouquins originaux, mais il ne me semble pas que les parents de la petite Sophie paraissaient si incompétents dans leur rôle. Je ne sais pas donc si c'était voulu ou si cela relève de maladresses de réalisations mais dans ce film-ci les parents semblent parfois jouer un jeu malsain avec la fillette, la poussant presque à commettre ses méfaits pour pouvoir la gronder. Les théoriciens du double lien en psychologie pourraient en faire toute une conférence.
Reste à parler d'une scène d'une grande horreur et qui ne passerait sans doute plus aujourd'hui:
Est-ce que la jeune actrice a vraiment découpé ses petits poissons rouges vivants pour les besoins du film ?!
Faute d'un gros plan plus précis on peut se permettre de douter mais les plans laissés nous montrent encore des petites bestioles sautillantes sur la table jusqu'à ce que la jeune actrice ne les gratifie d'un coup de canife. La scène semble ainsi terriblement réel à l'œil nu, ne témoignant à priori d'aucun artifice. Au mieux elle est donc des plus réussies, au pire elle est des plus réelles.
On pourrait arguer que l'époque n'était pas encore si regardante à la condition animale et que cette réflexion est peut être anachronique mais un an plutôt Cannibal Hollocaust n'avait-il pas fait scandale pour ses animaux massacrés à l'écran (entre autres choses, évidemment, c'est un peu le film de tout les scandales) ?
De quoi se demander si la scène pourrait être gardée en l'état aujourd'hui que les esprits ont effectivement plus encore évolués sur cette question ou s'il ne souffrirait pas d'une légère censure.