Du Soulèvement National

J'étais sceptique. Vraiment sceptique. La bande-annonce me faisait un peu peur, certains retours me disaient que c'était un film anti-flics. Non pas que je sois très admiratif des policiers, mais le manichéisme d'un scénario sur la banlieue me fait toujours peur. D'un autre côté, j'adore Kim Chapiron et j'aime beaucoup Kourtrajmé en général, j'attendais donc quelque chose.

Et puis, j'ai vu le film en Avant-Première (encore une fois, merci SensCritique !!).

Ce film est un signal d'alarme pour le peuple français. Sortons dans les rues. Rejoignons la lutte. Allons décapiter Macron et changeons les règles.

Ladj Ly était là pour défendre son film. Il disait avoir fait des documentaires avant la fiction et qu'il s'était inspiré de son expérience pour faire le film. Evidemment, ça se voit dans sa manière de filmer. On a presque l'impression que la caméra est tenue par un acteur. Elle bouge beaucoup, reste proche des personnages, parfois elle zoome bizarrement comme un cadreur qui tente des trucs sur le tas. C'est très immersif, comme dans Utoya, 22 Juillet sorti l'an dernier que j'avais adoré.

Les acteurs sont géniaux. Damien Bonnard a une sympathie imprimée sur le visage. Djbril Zonga a en même temps la carrure du mec là pour apaiser tout le monde et en même temps celle du jeune encore un peu perdu. Alexis Manenti joue le flic débordé et parfois abusif et mégalomane.

L'ambiance est pesante pendant tout le film. La quasi absence de musique joue également là-dessus. Ce sont surtout des sortes de bourdonnements ou de petits sons qui jonchent le métrage. Mais c'est aussi ce qui rend le tout "documentaire" voire "reportage".

Maintenant, le film montre le ras-le-bol général des français. C'est en ça que le scénario est intelligent. On voit d'un côté les jeunes de cité qui foutent le bordel parce qu'ils sont jeunes et par manque de contrôle ou d'autorité. De l'autre, on voit des policiers, 3, qui doivent surveiller la cité, livrés à des dizaines d'individus pouvant se monter contre eux. Tout le monde est fatigué. On le voit dans la vie privée des policiers. Chris en a tellement marre qu'il s'assoie sur son canapé en rentrant chez lui, il ne touche ni sa femme ni ses filles. Il se pose et souffle. Il n'a qu'un seul moment de repos. Gwada a également besoin de souffler, vivant avec sa mère. Et Stéphane appelle son fils qui vit loin de lui. Tous sont fatigués, essoufflés par le quotidien de la ville. Même les adultes de la cité sont fatigués.

Ce qui mène à la fin, cette révolte des "citoyens" contre "l'autorité" dans l'immeuble. La tension monte en puissance. Le film a l'intelligence de s'arrêter là où il faut. On a le souffle coupé et on se permet de respirer à l'apparition du générique. Enfin, le film nous le permet. Mais on a peur pour tout le monde à chaque instant. Pour les enfants et les adultes. Tout le temps. La scène au cirque avec le lion est d'ailleurs très tendue. On a vraiment peur pour l'enfant, le film nous rentre dedans.

On est bouleversé de bout en bout avec ce film. Ce film qui montre que tout le monde en a marre. Tout le monde est fatigué. Tout le monde est à bout, à cran. Alors que nous devrions tous nous unir; C'est d'ailleurs ce que montre la première scène. Les français sont unis par les drapeaux et la nation. Certes, c'est du football et on sait que beaucoup de jeunes ne se sentent pas français. Mais n'empêche qu'au fond, ils sont contents de voir la France gagner la Coupe du Monde. Ils sont réunis. Ils sont français. Et le patriotisme est important, dans le film. Les gens sont soudés et intégrés. Ladj Ly lui-même faisant référence à Victor Hugo, LE représentant de la culture française, avec Molière, disons.

Ce film est un cri de ralliement. On le voit encore plus dans l'affiche. Des gens rassemblés sur les Champs-Elysées, devant l'Arc de Triomphe. A part les supporters de foot, quels gens sont là-bas chaque samedi pour tenter de sauver ce qu'il leur reste de vie ?