Lâcheté et mensonges
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Le désordre, c'est l'ordre, moins le pouvoir.
Léo Ferré
L'année 2019 aura été riche en films critiques de leur société. Si Parasite forme une excellente représentation de la lutte des classes et Joker reproduit à merveille la naissance d'un mouvement anti-système - et en cela, les deux films sont, par leur contexte, très importants - Les Misérables perfectionne le concept, et est d'autant plus pertinent que les violences dénoncées monopolisent depuis quelque temps l'actualité française.
On observe d'un point de vue externe (celui d'un nouveau flic) le quotidien de policiers du 93, qui tentent à leur manière de gérer les conflits suscités par les ethnies co-résidentes. Et ce qui est magnifique, c'est que Les Misérables ne penche d'aucun côté de la balance : on parvient à comprendre chaque groupe individuellement. On comprend leurs agissements, leurs raisons, leurs peurs, leur haine.
Bien sûr - et c'est là une partie du message du film - ce n'est pas parce qu'on comprend qu'on doit accepter. Les conditions de vie expliquent la violence, mais ne l'excusent pas. Le casting merveilleux et l'écriture parviennent vraiment à faire apprécier ou non des individus au sein de groupes, de nous pousser hors de nos préjugés sociétaux.
A la fin, lors de la révolte, on met d'ailleurs de moins en moins un visage sur les attaquants. Cela montre que dans de telles conditions, on n'est pas en mesure de comprendre ou d'apprécier un individu : il devient un monstre au milieu du troupeau.
Et lorsqu'on met un visage sur une personne, alors il s'humanise, et même si on ne l'apprécie pas, alors on en saisi toute la subtilité. En l'occurrence, le personnage de Chris, interprété par Alexis Manenti, est un certes enfoiré, mais c'est par crainte et par auto-protection qu'il fait régner sa loi d'une manière plus que discutable. A l'inverse, le gamin incarné par Issa Perica agit par vengeance et par aversion envers une autorité qui le hait encore plus.
Les Misérables possède, au-delà du message qu'il nous fait passer à coup de Flash-Ball, de véritables qualités de mises en scène. Il s'apparente presque à un documentaire, d'où un réalisme d'autant plus déroutant. L'action se déroule principalement sur une journée bien dense, extrêmement intense, voire véritablement traumatisante. L'image est extrêmement dynamique, si bien que le film devient essoufflant !
Plus qu'essoufflant, il est une véritable épreuve. Croyez-bien que je prends ces mots avec des pincettes : dans ma modeste expérience cinématographique, je n'ai jamais eu aussi peur que devant ce film. La violence dénoncée ici est réelle, elle concerne le quotidien de plein de gens. Vivre le film au cinéma, c'est être encore plus imprégné dans cette véritable ambiance de guerre. Voyez-le dans de bonnes conditions.
Je me suis retrouvé plusieurs fois à me dire : "mais ils sont tous demeurés, ils ne prennent pas la peine de discuter !". Ce monde-là me paraît loin, surtout pour nous qui débattons en toute bienséance sur Sens Critique, avec nos claviers plutôt qu'avec des battes, des mots plutôt que des hurlements, de l'altruisme plutôt que de la peur.
Finalement, Les Misérables est juste un message de paix, de communication. Il propose d'abandonner tout préjugé, toute phobie de l'autre, d'aller à la rencontre des différences, de comprendre le point de vue opposé, de rejeter tout ethnocentrisme, et enfin de trouver des solutions basées sur l'écoute, la tolérance, et enfin sur l'ultime mot de notre devise, souvent le plus négligé :
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le 16 janv. 2020
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