Lâcheté et mensonges
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J’étais tout fier de commencer ma critique en disant que Les Misérables de Ladj Ly était un film « coup de poing », jusqu’à ce que je regarde un peu ce que la presse en disait et que je voie que tout le monde avait déjà utilisé cette expression pour ce film… Mais ce n’est pas très étonnant, car ce film te file un réel coup de poing, surtout lorsque tu émerges de la partie finale explosive.
Pourtant, même sans cette partie, la première heure de film est un choc, beaucoup plus dilué néanmoins. On suit l’arrivée d’une nouvelle recrue dans la BAC de Montfermeil pendant 24h et ce sont 24h intenses, faites de petits éléments en apparence légers dans une commune parisienne hors norme. On ne va pas se mentir, en tant que petit Belge campagnard, je ne peux pas vraiment évaluer le caractère réaliste de ce film, mais je ne pense pas me tromper en disant qu’il est 100% fidèle à une certaine réalité du terrain : Ladj Ly a lui-même vécu son enfance dans le quartier des Bosquets de Montfermeil, il sait vraiment de quoi il parle.
Pour autant, ce film n’est pas pour moi un documentaire : c’est un vrai film de cinéma, avec des scènes d’ouverture et de clôture magistrales, mais aussi un développement de personnages fin, des scènes d’action parfaitement filmées et un montage globalement réussi. Cerise sur le gâteau, Ladj Ly se permet pas mal de scènes esthétiques grâce à un drone qui est par ailleurs un des protagonistes principaux du film : brillant. Les petites histoires parallèles sont toutes intéressantes, de l’ex-taulard qui va à un entretien d’embauche aux réunions de mise en commun d’argent.
Ce film est un grand film par sa maîtrise cinématographique, mais également dans son analyse des différentes personnalités de ce type de quartier. Si le but évident est de mettre en image diverses bavures policières (dont la principale fait écho au propre vécu de Ladj Ly), tous les protagonistes de l’histoire en prennent pour leur grade. En ce sens, Les Misérables met en évidence l’extrême difficulté qu’ont tous les acteurs de ces quartiers à trouver des solutions pour les nombreux problèmes auxquels ils sont confrontés et le pouvoir que chacun pense avoir dans ces endroits se révèle très rapidement être précaire et insuffisant.
Je divulgâche un peu dans ce qui suit, mais après 1h20 de film, les 24 heures de la journée sont finies, les personnages rentrent chacun chez eux (des moments d’ailleurs particulièrement bien choisis), il y a même un coucher de soleil qui annonce « clap de fin », debriefing : eh bien c’était un bon film dis donc. Mais que nenni, le matin se lève, une nouvelle journée faussement détendue commence par des pistolets à eau qui vont amener à un final explosif.
Je tiens à signaler l’absence complète des femmes dans ce film (ce ne sont pas les quelques mamans et autres fillettes qui auront grandement contribué au récit, malheureusement), un indice probablement réaliste de l’invisibilisation des femmes dans ce genre de contexte, une preuve supplémentaire de l’énorme travail qu’il reste à faire pour faire évoluer positivement cette situation.
Critique publiée ici : https://lecrandegontran.wordpress.com/2020/06/12/les-miserables-de-ladj-ly/
Créée
le 18 juin 2020
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