Film atypique, dérangeant, et pourtant d'ores et déjà ancré dans une continuité et une cohérence dans l'oeuvre générale de Werner Herzog. Les Nains aussi ont commencé petits, c'est l'étrange histoire d'une institut, ou du moins, une maison de correction, peuplée par des nains autant chez les patients que à la direction. On retrouve ici une institution marginalisée, totalement coupée du monde sans aucun contact extérieur où les occupants se révoltent contre la direction tenant en "otage" un patient.
Aux premiers abords, on pourrait percevoir à travers ce film une simple histoire de révolte de la part de nains pour sauver leur camarade. Mais le film va au-delà de ça et se montre bien plus subtil. Tout d'abord, Werner Herzog ne filme pas des nains, mais des êtres humains avant tout. Il les filme comme des individus "normaux", sans les juger. Il aurait pu mettre en scène des personnes de tailles normales, ça aurait pu être exactement pareil. Ce n'est pas ce qu'ils sont qui est important, mais ce qu'ils font. Cette révolte des nains peut être assimiler à de nombreuses thématiques, que ce soit la chute d'une société, l'Enfer sur Terre ou encore l'apocalypse. Thématique récurrente dans le cinéma de Werner Herzog car ici, il nous montre un groupe d'individus perdant totalement la raison. Véritable déchéance humaine, les différentes actions semblent avoir un but anarchiste mais sont aussi absurdes et sans raison, totalement gratuites. C'est la plongée dans une folie commune qui pousse les personnes à agir de manière illogique, enchaînant actions destructrices mais aussi des projets inaboutis ( il suffit de voir l'instant où ils décident de prendre la voiture pour aller en ville ou encore la scène de repas) qui deviennent de véritables scènes de chaos accompagnées de ce rire dérangeant de Hombré qui couvre ces séquences pour traduire cette perte de raison. Par cette succession de scènes totalement délirantes qui peuvent parfois dépasser notre propre imagination, on se voit victime de rires nerveux tant les situations dépassent l'entendement.
Werner Herzog parvient ici à nous déstabiliser, à nous montrer une émeute de nains avec un certain regard. Un regard non pas critique, mais plus contemplatif. On les observe au plus près, sans vraiment les juger, même si cela a l'air parfois grotesque. On se dit que cette part de folie peut arriver à tous. Qu'il suffit de vivre couper du monde et de se voir naître le fantasme de découvrir de nouvelles choses et de casser le quotidien au point d'en perdre la raison.