Apprenez le sens du mot "echec".
On pense souvent qu'un remake est une entreprise simplement racoleuse et purement inutile d'un point de vue strictement artistique. Monumentale erreur. Car si les exemples de mauvais remakes pullulent effectivement, il en existe au contraire qui ont réussi à se démarquer de leur modèle en poussant le concept de base dans leurs derniers retranchements, à l'image du cultissime "The thing" de Big John Carpenter.
Relecture d'un thriller efficace signé Jack Lee Thompson qui avait surtout pour lui l'affrontement dantesque entre le droit Gregory Peck et le mal absolu incarné en la personne de Robert Mitchum, "Les nerfs à vif" version Scorsese, bien que reprenant exactement le même schéma, vogue vers des eaux bien plus troubles pour un résultat plus rentre-dedans, plus ambigu et surtout bien plus sexué.
Parabole sur l'homme moderne et civilisé, sur sa nature bestiale enfouie et le semblant de justice qu'il a érigé de ses propres mains, "Les nerfs à vif" tape dans le pur thriller domestique mais le fait avec une maestria de chaque instant, offrant un spectacle baroque et violent, confrontation au sommet entre un De Niro bestial, tatoué des pieds à la tête, félin, aussi séduisant qu'effrayant, et un Nick Nolte une fois de plus impeccable en bon père de famille dépassé par les évènements. Si elles jouent leur partition avec conviction, Jessica Lange et Juliette Lewis essuient malheureusement les pots cassés de leurs personnages proprement insupportables.
Volontairement excessif, frôlant parfois l'univers du conte (la relation entre la fille et le grand méchant loup), "Les nerfs à vif" est une ode magnifique et totalement assumée à la loi du talion (autres temps, autres moeurs) magistralement mise en scène par Scorsese et rythmée au son de la partition puissante d'un Elmer Bernstein reprenant magnifiquement le thème original de Bernard Hermann.