La mort de Siegfried :

De cette légende germanique des Nibelungen, je dois avouer tout d'abord que je n'ai toujours pas trouvé matière à savourer, ni à m'indisposer réellement non plus et je parle bien de l'histoire. C'est bien plus grace au traitement cinématographique de Lang que j'ai pu apprécier quelques moments de plaisir.

Pour commencer, Lang prend bien soin à nous en mettre plein la vue à plusieurs reprises. Son oeuvre se doit d'être aussi grandiose que l'adaptation musicale wagnérienne.
On est alors surpris, c'est bien le mot, par l'ingéniosité technique et les moyens mis en oeuvre pour produire pareil spectacle au début des années 20.
Les premières images, les décors, les costumes, la mise en image est sublime, étonnante de puissance, d'imagination, elle force le respect. Indéniablement Lang maîtrise parfaitement tous ses éléments formels.
La séquence du dragon est stupéfiante à ce propos. Les mouvements oculaires et ceux du cou de la bête sont d'un réalisme saisissant. Tout cela à la main! Le génie des premiers temps cinématographiques ne cesse de m'épater.
Les placements et les mouvements de caméra sont si bien pensés et effectués qu'on reconnait d'ores et déjà en Lang le maître cinéaste.

Ce qui m' a cependant fait lacher prise à plusieurs reprises lors de ce long spectacle (autour des 2h30, si mes souvenirs sont bons), c'est la grandiloquence des acteurs. Quelque chose qu'on soupçonne souvent a priori pour l'époque du muet et qui quelque fois, bien plus souvent qu'on ne se l'imagine n'a rien à voir avec la réalité et le jeu par moments très moderne et juste de ces acteurs, c'est une mise en scène ampoulée des comédiens, à force de grands gestes, de yeux exorbités, de pauses avec mains sur la poitrine etc. Et il m'a semblé que certains comédiens à commencer par Margaret Schön, versent un peu dans cette emphase, une consommation déraisonnable de la gesticulation comme mode d'expression.
Il n'y a guère que Theodor Loos qui m'a au contraire impressionné pour sa sobriété, sa mesure, sa parcimonie.

Reste que le film reste fort agréable à suivre. Les deux heures trente passent relativement vite, sans déplaisir, bien au contraire.

La vengeance de Kriemhild :

Autant le premier film regorge de ces grands moments de cinéma spectaculaire, autant celui-là fait une plus grande part à la tragédie et sa démonstration de pathos. Et la reine Krimhild est en première ligne, sa vengeance prenant toute la place en son coeur et âme comme sur l'écran.
Ce deuxième opus m'a paru bien plus long. Et je doute qu'il le soit vraiment.
Il faut attendre la toute dernière partie pour se surprendre à être encore une fois subjugué par la grandeur des moyens mis en branle pour créer ce monstre de spectacle. L'incendie du palais d'Attila (au maquillage cela dit en passant inquiétant dans la pénombre et plutôt grossier en pleine lumière) est le moment fort du film.
Les méandres de la vengeance de la reine m'ont perdu bien avant malheureusement. La position obstinée de ses frères, d'elle même (tout le monde passe son temps à camper sur ses principes) m'ont éreinté plus que tout. J'en ai vraiment plus rien à faire pour être poli de cette histoire.
Somme toute, un divertissement de poids, une masse de figurants, des décors impostants, tout cela superbement cadré et mis en lumière et ombre, mais une histoire qui m'a totalement laissé impassible dans le meilleur des cas.
Alligator
5
Écrit par

Créée

le 5 janv. 2013

Critique lue 1.2K fois

3 j'aime

Alligator

Écrit par

Critique lue 1.2K fois

3

D'autres avis sur Les Nibelungen

Les Nibelungen
DanielO
10

Unis dans la haine...

Le cinéma allemand des années 1920 fût très fortement marqué par le cataclysme de la Première Guerre mondiale et le chaos politique et social qui s'ensuivis. Si des films comme "Le dernier des...

le 23 sept. 2012

48 j'aime

8

Les Nibelungen
Docteur_Jivago
9

L'Intemporel Vengeance

Énorme production divisée en deux parties de 143 et 145 minutes, Die Nibelungen, dixième film de Fritz Lang, puise ses influences dans divers histoires scandinaves et germaniques, dont la chanson des...

le 10 juil. 2014

21 j'aime

5

Les Nibelungen
Morrinson
9

La chute des Huns et la mort des autres

Partie 1 : Le talent de Siegfried, chasseur de dragons. Les 150 minutes de la première partie des Nibelungen procurent le même effet qu'un rouleau-compresseur épique et émotionnel : on en ressort...

le 11 mars 2017

19 j'aime

4

Du même critique

Cuisine et Dépendances
Alligator
9

Critique de Cuisine et Dépendances par Alligator

Pendant très longtemps, j'ai débordé d'enthousiasme pour ce film. J'ai toujours beaucoup d'estime pour lui. Mais je crois savoir ce qui m'a tellement plu jadis et qui, aujourd'hui, paraît un peu plus...

le 22 juin 2015

55 j'aime

3

The Handmaid's Tale : La Servante écarlate
Alligator
5

Critique de The Handmaid's Tale : La Servante écarlate par Alligator

Très excité par le sujet et intrigué par le succès aux Emmy Awards, j’avais hâte de découvrir cette série. Malheureusement, je suis très déçu par la mise en scène et par la scénarisation. Assez...

le 22 nov. 2017

54 j'aime

16

Holy Motors
Alligator
3

Critique de Holy Motors par Alligator

août 2012: "Holly motors fuck!", ai-je envie de dire en sortant de la salle. Curieux : quand j'en suis sorti j'ai trouvé la rue dans la pénombre, sans un seul lampadaire réconfortant, un peu comme...

le 20 avr. 2013

53 j'aime

16