Disney et la JapaMarveNolanisation
Avant de commencer, précisons que je ne connais absolument pas le Marvel dont ce film se serait inspiré, et que je n'ai cherché aucune information à ce sujet.
Je me suis lancé dans ce Big Hero Six sans en attendre quoi que ce soit. Avec Don Hall (Winnie l'Ourson) et Chris Williams (Volt, star malgré lui), il y a de quoi, à ce qu'on dit. Après, le premier a scénarisé Tarzan, le second Mulan et ils ont écrit ensemble Kuzco, soit trois films de mon enfance abreuvée de Disney. En plus, Lasseter, réalisateur de mon film-d'enfant-préféré-de-tous-les-temps (cfr mon top 10) est producteur exécutif de ce bazar, donc ça fait encore un point en plus pour tout nineties kid qui se respecte.
Mais je m'égare. Nous avons donc comme cadre géographique de ce film une ville pseudo-futuriste nommée San Fransokyo, dans laquelle...
STOP. "San Fransokyo"? C'est quoi ce bordel? Le film nous balance cette énormité dans la face, sans aucune explication historique, géopolitique ou de quelque nature que ce soit. Alors, ok, c'est un film pour gosses, mais remplir San Francisco de personnages avec des noms d'asiatiques mais qui vivent comme des purs ricains, de ballons rouges bien cliché et d'architectures pourries comme on en trouve dans n'importe quel quartier chinois bien stéréotypé, c'est un peu énorme. Alors, à part une volonté de Disney de faire la paix avec le Japon et sa culture (cfr la guerre Disney/Ghibli, Walt Disney/ Hayao Miyazaki) et/ou de surfer sur la vague de la japanisation post Club Dorothée (manga, j-pop et consors), moi, je ne trouve pas d'autres explications à cet univers bidon.
Bon, si on tape ça de côté, il nous reste une brochette de personnages numériques et colorés, qui ne sont pas (trop) désagréables. Le coup de coeur va évidemment au robot Baymax, qui est, de loin, le personnage le plus creusé de cette histoire. Pour le reste, on a des personnalités et archétypes assez classiques; même si ils sont légèrement revus au goût du jour (une fille mauvais garçon, un black scientifique de haut niveau, un gosse de 13 ans surdoué...). Hiro, le héros de cette aventure, est plutôt plat et rappelle un peu trop le héros de How To Train A Dragon. Quant à ses compagnons, ils ne sont pas assez exploités du tout. Faut dire qu'ils deviennent ses amis d'une manière assez précipitée et peu crédible. On est en 2015, quoi.
Là où le film gagne quelques points, c'est encore dans ses arcs scénaristiques. Big Hero Six aborde en effet des thèmes modernes et relativement durs pour le public ciblé: un personnage orphelin, la parte d'un frère dans une catastrophe assez violente et la vengeance étant les trois sujets intéressants ici. Après, c'est pas toujours bien traité, et je ne crois pas qu'on va avoir affaire à une génération de traumatisés comme après Bambi, mais l'intention reste louable.
Ensuite, on sourit de temps en temps grâce à Baymax, tout en repensant avec nostalgie à un certain Wall-E. ce qui nous amène à l'esthétique du film: en gros, c'est un Pixar sous le label Disney. On a envie de dire que "c'est joli", mais, en 2015, qu'un film d'animation "soit joli", ça reste le minimum. La preuve, même Dreamworks fait des beaux films maintenant. Surtout que la caméra donne parfois envie de gerber lors de certaines scènes d'action. Sinon, certains plans sont effectivement esthétiquement bien trouvés, mais pas forcément ceux auxquels on aurait pu s'attendre, comme en témoigne la première scène de vol.
En ce qui concerne la musique, c'est simple: c'est merdique. Les Fall Out Boy (version pseudo-électro de magasin de vêtements), vraiment?
En bref, Big Hero Six est un film qui surfe sur la vague des nouvelles technologies, sans doute pour accrocher un nouveau type de public, tout en tentant de garder les ficelles traditionnelles de l'amitié, de la famille, de la noblesse... On pourrait soulever ici un débat autour de cette philosophie pro-technologie (c'est un peu Interstellar pour les enfants au niveau de la vulgarisation scientifique), mais si on en reste aux faits, le film reste divertissant et ne laisse pas trop le temps de s'ennuyer, et parvient à créer un peu d'émotion au milieu de cet océan numérique aseptisé. Pas un futur classique, mais pas un raté non plus.
Mais, on s'en doute, on va devoir se farcir une suite.