Avec ses "Nuits de la Pleine Lune" (qui rencontrèrent un certain succès populaire, pour une fois...), Eric Rohmer avait atteint une sorte de classicisme épuré, sans pour autant abandonner sa méthode si particulière de regarder, et de filmer l'amour et son époque. Avec ses personnages, comme toujours, un peu irritants et prisonniers de leur propres déclarations péremptoires, se débattant dans l'une de ces crises vaguement absurdes qui font pourtant nos vies, il s'agit peut-être du film le plus moral de Rohmer, qui est sans pitié pour ses personnages, mais ne tombe jamais dans le mépris ou la dérision facile..
Les Nuits de la Pleine Lune" s'avère aussi - a posteriori - le film le plus nostalgique des "Comédies et Proverbes", magnifié qu'il est par la présence princière et narcissique de Pascale Ogier (très crédible dans un rôle finalement assez difficile de fille superficielle, égarée dans son propre monde), pour qui l'amour et la mort seraient finalement une seule et même chose... Mais ce fut sans doute la découverte de Fabrice Luchini, très drôle et encore inconnu du grand public, qui, à l'époque, marqua le plus les esprits et contribua au succès du film !
"Les Nuits de la Pleine Lune" part donc du récit d'une banale crise de couple pour déboucher sur un portrait doux-amer, mais assez implacable, d'une époque aussi superficielle que chatoyante : trente ans plus tard, et même si ce n'était certainement pas le projet de Rohmer, voici donc une touchante évocation des nuits branchées de la capitale... On y danse dans les légendaires "120 Nuits", et on y voit Elli Medeiros se trémousser sur sa propre musique au cours d'une party très parisienne !
A noter pour finir que plusieurs scènes frôlent ici le sublime, comme cette mystérieuse ellipse sur Luchini dans le café, totalement magique !
[Critique remise en forme en 2018 à partir des notes prises lors des précédents visionnages du film]