Thriller glauque et nocturne, Les Nuits de Mashhad détourne son réalisateur iranien Ali Abbasi du pure fantastique (tantôt dramatique, tantôt d'épouvante) qui baignait ses deux précédents films, Border et Shelley.
Narrant l'histoire vraie d'un tueur de prostituées dans la ville sainte iranienne de Mashhad, le film a été tourné en Jordanie pour éviter la censure de l'état. Le ministre de la culture iranien reconnait d'ailleurs avoir fait pression sur l'état français pour éviter sa sélection à Cannes, où l'actrice principale Zahra Amir Ebrahimi est repartie avec un prix de l'interprétation féminine largement mérité.
Le choix de cette comédienne au casting n'est pas un hasard: condamnée pour son apparition dans une sextape rendue publique par son ancien compagnon, tous ses rôles sont annulés. L’État ira jusqu'à l'interdire d'apparaitre dans des films ou à la télévision, mettant fin à sa carrière iranienne et la poussant à se réfugier en France. Un choix logique donc pour parler de la société iranienne actuelle et ses travers, religieux et moraux.
Coup de poing, le film n'épargnera rien au spectateur de la violence qui baigne la société iranienne. De la place de la femme à l'hypocrisie générale baignant la question sexuelle, les problèmes de drogue, la corruption, Ali Abbasi les infuse dans son thriller poisseux qui n'est pas sans rappeler un certain Zodiac.
Souffrant de quelques longueurs et d'une linéarité parfois lassante, Les Nuits de Mashhad tiendra tout de même son spectateur en apnée jusqu'à un final troublant où un renversement de valeur nous place dans une situation inconfortable.
En effet, après que le tueur soit enfin appréhendé grâce au travail de la journaliste, sa condamnation à mort reste incertaine: le sentiment d'injustice qui s'en dégage et nous révolte nous est presque aussitôt renvoyé à la gueule via la scène de pendaison finale et sa violence crue.
Bref, un film froid, violent, étouffant mais nécessaire.