Ce sera une fille. Tu sentiras l'essence toute la journée. Quelle bonheur.

Les parapluies de Cherbourg, 1964, palme d'or 1964 (entre 1963 Le knack... et 1965 Le guépard), franco-allemano-américain (tourné en France, réalisateur français, productrice française, moyens financiers 1 français majoritaire, 2 allemand et 3 américain), avec Catherine Deneuve (premier, premier rôle). Genre : comédie musicale dramatique. Langue : français (chanté en français). 1H31. Format : 1,85 sur 1 (feuille A4, L 29,7 x H réduite 16,1). 1er jour de tournage : mi juillet 1963, avec acteur 17 août 1963. Fin de tournage : 20 octobre 1963. Lieux de tournage : Cherbourg (nombreux endroits dont port, rues ville basse, théâtre, ...) et brève incursion à Nantes (Passage Pommeraye). Version restauré 2003 par Ciné-Tamaris (numérique et son numérique stéréo à partir de l'original argentique son magnétique mono).


intégralité Réalisation, scénario, paroles, à 32 ans : Jacques Demy
intégralité Musique, orchestration, direction musicale, à 31 ans : Michel Legrand


5 premières minutes : en novembre 1957, un employé mécanicien (1) termine sa journée pluvieuse. Il se change avec ses collègues puis se rend à bicyclette pour attendre à la nuit tombée sa petite amie dans une rue commerçante. La jeune femme sort bientôt d'une boutique de parapluies pour le rejoindre sur le trottoir d'en face.
(1) le père de Jacques Demy tenait un garage à Ponchâteau (50 km de Nantes, en direction de Vannes). Il destinait son fils à la reprise de l'entreprise.


QUELQUES PETITS MOMENTS NON VIOLENTS DE BONHEUR


Générique de début en plan séquence
Ouverture au blanc (de noir vers image) par iris central, à la manière des réalisateurs adulés par Demy (Max Ophüls, Robert Bresson, Jean Cocteau), s'ouvrant sur le port de Cherbourg. Sirène de brume, thème de Geneviève lent et doux, panoramique vertical haut bas jusqu'à surplomber le damier des pavés de granit embrassant toute l'image. Une jeune femme en couple avec un marin (Cherbourg était un port de la marine nationale) scrute le ciel et ouvre un parapluie. Il pleut désormais. A la reprise du thème additionné de violons (force), flûte (mélodie) et xylophone (pluie), apparaît une rangée improbable de plusieurs parapluies traversée par la première ligne de force horizontale, soutenue par le passage d'un landau rouge et orange sur la deuxième. Demy rend ici hommage à Chantons sous la pluie 1952 qui lui aurait déclenché l'idée du film. De nombreux parapluies mono-colores traversent le champ en droites quadrilatérales soulignant le cadre, ou sans parapluie en diagonale. Panoramique inverse sur la même vue du port mais sous la pluie.
A l'heure où les génériques sont confiés à des boites externes de créa, si d'aventure vous êtes sensibles au fait-main, à Jacquot de Nantes, à Michel Legrand comme un des maîtres mondial de la musique du XXème siècle, et si derechef vous avez doublement oublié votre mouchoir et d'aller faire pipi avant la séance : dès la deuxième reprise du thème, vous êtes mal !
Générique : https://www.youtube.com/watch?v=M3yisHmSY7Q


Jacques Demy impose un décor très coloré peint sur les maisons, mobiliers de rue, vêtements, souvent ton sur ton. Cette idée est reprise trois ans plus tard par Michelangelo Antonioni pour Blow-up avec un code couleur plus élaboré à base de couleurs chaudes pour les actions et froides pour les calmes, le N&B (blanc) liant les lieux et scènes. Point commun au deux génies : un budget peinture conséquent !


Cette version de et par Michel Legrand (7 ans avant sa mort, la voix un peu diminuée mais la direction toujours très ferme) dont en français le thème de Roland (évoquant Lola où Marc Michel tenait le premier rôle) et en anglais (issue de la comédie musicale américaine) me parait intéressante https://www.youtube.com/watch?v=bVYZtFJqeaY parce qu'il s'agit d'un pot-pourri de plusieurs des thèmes du film.


Un thème musical propre à chaque personnage ou situation Exemple, tentative d'explication du thème de Madame Émery, sans bande son ni partition (ici à partir du compteur dégressif 1.06.57, le plan immédiat après la visite au joaillier) :
- Quelle heure est-il ?
- Six heures et quart
- Comment se fait-il qu'il ne soit pas encore venu ?
- C'est peut-être un escroc ; Il t'aura fait marcher
- Tu divagues ; Mais qu'est-ce que tu as ?
Ce thème est repris plusieurs fois, dans différentes variations, y compris solo, jazzy, avec différentes paroles, puis retour au thème de base avec " je rentre à Paris, et demain je repars pour Londres. Tenez voilà l'argent que je vous ai promis, vous transmettrez à Geneviève mon bon souvenir, et croyez que je ne manquerai pas... ". Pour micro exemple, si on compare la première phrase du premier plan "quelle heure est-il" avec les MÊMES NOTES de la première phrase du dernier plan "je rentre à Paris" de cette scène :
- quelle – heure – est – il - (4 syllabes, mais "quelle" en note longue, soit 5 temps)
- je – ren – tr'à – pa – ris - (5 syllabes sur 5 temps)
On peut s'approcher de la mélodie en compteur 10.28 à 11.19 https://www.youtube.com/watch?v=K_-gIdMYiyI, et même chanter sur la guitare (paroles chantées qui équivaut à la main droite au piano) en tentant de faire abstraction du xylophone (main gauche). Attention, première note "Quelle" (déplacer le compteur un peu avant 10.28).


Concernant ce thème précis, je trouve un esprit un peu similaire avec le couplet départ de Oum le dauphin, 1971, (https://www.youtube.com/watch?v=vY_TcSBZJnY ), musique (et chanté par) Michel Legrand, paroles Vladimir Cosma (si, si, fallait bien manger).


Guy annonce son départ pour le service militaire (obligatoire de 2 ans sous de Gaulle) qu'il effectuera durant les événements (la guerre d'Algérie) ce qui remet en cause le mariage.
La scène mythique du café suivi du fameux travelling
https://www.youtube.com/watch?v=Rq0yhizu0y8
Demy place le couple sur le chariot du travelling. La caméra est fixe par rapport au couple mais en travelling avec le fond, comme pour les extraire de la réalité et de l’environnement qui les conduisent, après que Geneviève se soit brièvement accrochée à la grille, vers leur premier rapport intime.
Demy s'est peut-être souvenu de son premier travelling, en départ de gare, avec une baby caméra, quand il partait de chez sa grand-mère en train les fins de semaines à Mauves-sur-Loire où il fut un an scolarisé en primaire, pour rejoindre ses parents à Nantes. C'est également à cet endroit qu'il mettra, adolescent, en boîte ses premiers courts résidant l'été en face au hameau de La Chebuette, puis La pierre percée dans la commune de Saint-Julien-de-Concelles relié à Mauves-sur-Loire par un pont.


Distribution dans l'ordre d'audition de chant apparu à l'image
- un client du garage (?, voix ?)
- Guy Faucher (Nino Casteinuovo, voix José Bartel)
- Aubin, le patron du garage (Jean Champion, voix Raoul Curet)
- Pierre, un employé mécanicien (Jean-Paul Chizat, voix ?)
- un employé mécanicien Jean ou Bernard (Pierre Caden, voix Michel Legrand)
- un employé mécanicien Jean ou Bernard (Jean-Pierre Dorat, voix Jean-Claude Briodin)
- Geneviève Émery (Catherine Deneuve, voix Danielle Licari)
- Mme Émery (Anne Vernon, voix Christiane Legrand, sœur de Michel Legrand)
- un client de la boutique ( ?, voix ?)
- tante Elise, marraine de Guy (Mireille Perray, voix Claire Leclerc)
- Madeleine, infirmière d'Elise (Helene Farner, voix Claudine Meunier)
- le serveur du dancing (Patrick Bricard, voix Jacques Demy)
- un jeune homme égaré ( ?, voix Jacques Demy)
- le facteur ( ?, voix Michel Legrand)
- Monsieur Dubourg, joaillier (Harald Wolff, voix Jean Cussac)
- Le diamantaire Roland Cassard (Marc Michel, voix Georges Blaness)
- un client du garage (Philippe Dumat, voix ?)
- le patron du café du Pont Tournant (Roger Perrinoz, voix José Germain)
- un déménageur ( ?, voix Raoul Curet)
- un déménageur ( ?, ?)
- une entraîneuse du Bar du Port (Dorothée Blank, voix ?)
- Jenny (Jane Carat, voix Jeanette Bocaumont)
- la patronne Mme Germaine (Gisèle Grandpré, voix ?)
- le pompiste ( ?, ?)


Presque hors propos, Michel Legrand nous plonge dans une suite de carrière aux Etats-Unis où il écrit la totalité des musiques de L'affaire Thomas Crown 1968 (avec Steve McQueen et Faye Dunaway, j'ai du mal à avaler ma salive) dont la chanson majeur The Windmills of Your Mind (paroles Alan et Marilyn Bergman) devenue ensuite Les moulins de mon cœur (paroles Eddy Marnay) repris dans le générique de fin de Thomas Crown 1999 par Sting.
http://www.chartsinfrance.net/Michel-Legrand/news-109262.html passionnant de bout en bout.

cestjeff
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le 17 août 2020

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cestjeff

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