C'est, parait-il, le chef d'oeuvre de la Nouvelle Vague Tchécoslovaque, mouvement cinématographique qui a suivi de peu la version française, et qui a joué avec les limites de la narration et de la censure cinématographique, avant de se faire couper les ailes suite au Printemps de Prague...
Et je veux bien croire que c'est un film emblématique, parce que c'est super cool.
Alors ouais, on retrouve des trucs qui font Nouvelle Vague. On a des éléments assez godardien (avec des gens qui balance des aphorismes en glandant dans leur appart, certes, mais pas que), et on pense aussi pas mal au Zazie dans le Métro de Louis Malle. Mais Chytilova pousse la réinvention du cinéma plus loin que les français, jouant avec les formats (couleur, N&B, sépia, pellicule polarisée, accéléré, mais aussi passages en stop-motion qui évoque, eux, carrément le Tetsuo de Tsukamoto), et une utilisation de menus symboles qu'on vide, en fait, de tout sens (Coucou Jodorowski).
Et la réinvention de passer aussi par la déconstruction de la narration. Le film ne raconte pas grand chose, se contentant de montrer son duo de grandes filles délurées profiter des largesses de vieux gars essayant de les serrer, foutre le bordel, voler, casser, en se demandant avec une ironie mordante si c'est de la dépravation, et si c'est vraiment grave, avec un montage là aussi super inventif.
Et le film de pousser le vice jusqu'à finir par l'illustration de la nullité de toute morale à ça, et de se dédicacer à ceux qui le censureront (en annonçant pourquoi il sera, au final, censuré). Si Godard avait (mal) tourné maoïste, ce film montre, lui, une orientation joyeusement anar, presque punk, qui fait bien plaisir.