Il était minuit. La ville était calme. Les lampadaires éclairaient d’une pâle lueure blanche les trottoirs déserts. Les appartements étaients tous semblables. Au loin résonnaient les insultes de motards dont les véhicules avaient été amochés par l'inattention. Quelques endroits étaient encore vivants : les bars, les boites de nuits, les épiceries et les carrefours. Au millieu d’une petite rue, une maison débordait sur la rue. Des plantes gigantesques s’étaient étendus et avaient pris possession de l’espace urbain. Il régnait une douce odeur de mimosa. Un chat bondit à l’intérieur de la cour. Il fit quelques tours sur les dalles froides et sombres puis, déçu, s'éclipsa. Le vent carressa les branches. Une feuille se décrocha d’un arbre et s’écrasa sur le sol dans un silence assourdissant. Soudain Alexandra ouvrit les yeux. On était lundi 22 octobre depuis quelques minutes et elle n’avait pas écrit sa critique. Elle avait promis et faillit à sa promesse. Et s’en voulut terriblement. Elle ne pourrait plus jamais se regarder dans la glace, elle le savait. Comment avait elle put faire ça…
Elle cria son désespoir à en faire trembler les murs du quartier et une grosse larme, solitaire, dévala sa joue. Elle savait qu’elle ne pouvait pas décemment habiter encore sous un toit aussi confortable après son acte odieux. Elle avait usurpé son nom. Elle enfila son pull préféré, puis estimant qu’elle ne le méritait plus, le reposa et se munie d’une veste trop petite. Elle ouvrit la porte de sa chambre silencieusement, puis fit son possible pour éviter les lattes grinçantes du parquet. Elle arriva devant la grande porte et inspira un grand coup. Elle aurait pû éviter ça. Elle aurait pû faire une critique simple dans laquelle elle s’émerveillerai d’abord de la beauté de caractère des gamins avant de s’épouvanter à grands éclats de la violence de leurs vie. Elle aurait pû écrire sur la mise en scène merveilleusement fluide de Truffaut. Au lieu de ça elle avait failli à sa mission et n’avait rien écrit. Elle serra les poings et ouvrit la porte. Il fallait qu’elle disparaisse. Qu’elle recommence une vie. Qu’elle s'oublie pour renaître. Elle marcha quelques longues minutes et trouva un endroit qui lui inspirait confiance.
Elle dormit dehors. Même si dormir n’était pas le mot qu’elle aurait choisit. Elle avait seulement fermé les yeux et réfléchit. Elle avait écrit sa critique dans le noir de ses pensées. Pour pouvoir tourner la page. Elle avait parlé des jeux de mises en scènes, avec les miroirs qui étaient remarquables, des impressions de tournis dans le manège qui relevait du génie, et d’un plan d’envol des pigeons qui, malgré son utilisation récurrente dans les films, restait quand même magnifique ... Elle avait penser au mixage son d’une qualité exemplaire, sauf parfois pour quelques voix, qui permettait de ressentir tous les bruits avec une douceur cassante . Elle avait eu des réflexions sur la relation mère - fils qui se développait au cours du temps, alimentés par une analyse détaillée de l’excuse de la mère morte, qui était évidemment tout sauf le fruit du hasard. Un enfant qui vient de comprendre que sa mère trompe son père et qui dit le lendemain que sa mère est morte, ça reste un enfant qui vient de comprendre que sa mère trompe son père et qui dit le lendemain que sa mère est morte. Ce n’est pas un hasard. Elle avait eu des phrases chocs sur la violence de la vie à l’époque. Sur la violence du quotidien, celle des mots, des sous-entendus, des punitions, du rabaissement. Elle avait disserté sur l’absurdité des réactions en chaînes malheureuse. Mais au petit matin elle n’avait rien écrit et admit qu’elle n’écrirai jamais rien de tout ça. Elle ne méritait plus les mots. Elle se leva et marcha. Elle focha une pomme sur un étalage. Marcha de nouveau. Fit quelques tours. Elle connaissait le quartier mais ne l’avait jamais vu aussi tôt. Il était neuf et propre. Les gens étaient rare et calmes. Et aspira l’air frais avidement. La fraîcheur lui brûlait les poumons. Elle était suffisamment jeune pour que le manque de sommeil n’ai pas affecté sa perception de la vie. Elle rejoignit l’Opéra et ses colonnes en pierre par une des petites rues qui quadrillent les environs. Elle s’assied sur les marches et attendit. Elle regarda la ville s’éveiller. Elle trouva ça beau. Le soleil s'éleva. Elle eu faim. Elle alla dans un supermarché, entreprit de voler un sandwich mais son manque d’expérience la trahit. Elle se retrouva entre deux policiers. Elle reprit une respiration brûlante de froid. Elle se mit alors à courir. Ils lui coururent après quelques mètres mais abandonnèrent. Elle couru plusieurs dizaines de minutes, l’esprit vide. Ses jambes la guidèrent. Elle dépassa les limites de la ville. Et traversa les champs de vignobles et les marais. Le bruit rapide de ses pas était parfaitement régulier. Elle ne pouvait pas s’arrêter. Bientôt elle sentit un vent nouveau. Elle laissa encore ses jambes lui indiquer le chemin et bientôt elle y fut. Devant elle, le sable, au delà, la mer, et après, l’infini. L’air n’était plus agressif. Elle regarda l’horizon puis le point final de cette critique.

Alexolandra
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le 4 nov. 2018

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