Les Rascals est le premier film de Jimmy Laporal-Trésor, auteur jusque-là de deux court-métrages dont Soldat Noir, qui a servi de préparation à ce film, en salles depuis le 11 janvier.
L'histoire se déroule dans le Paris de 1984, où elle s'attarde sur les bandes et les boneheads, individus issus d'un mouvement d'extrême droite et suprémaciste blanc. Nous suivons "Les Rascals", une bande de jeunes potes dont le destin sera lié à celui des boneheads.
Étant né à la fin des années 1990, je n'ai pas connu cette période où Paris était un lieu qui pouvait souvent être consacré aux bagarres entre boneheads et chasseurs de skins. Si les sujets tels que le racisme, la violence et la délinquance sont encore aujourd'hui très souvent évoqués, ils ne le sont plus à travers ces bagarres. Le film permet donc de poser une nouvelle fois ces problématiques avec non pas un phénomène nouveau, mais qui nous sort tout de même de l'imaginaire que nous avons aujourd'hui à travers, au cinéma par exemple, des films tels que "Bac Nord" ou "Les Misérables". Si j'ai précisé ne pas avoir pas connu cette France c'est parce-que durant les premières minutes du film, j'avais parfois plus l'impression d'être face à un film de bandes américain que français. Cette sensation s'est assez vite estompée au fil du visionnage.
Le film n'a pas été fait avec de grands moyens et cela ne se voit pas à l'écran. Le film bénéficie d'une bonne photographie, avec une réalisation et une mise en scène qui sont de manière générale efficaces (je pense par exemple à une scène avec jeu de lumière, brumant les mouvements de foules skinheads dans leur QG, le tout à travers l'oeil d'une personne alcoolisée). Ainsi, tous les moments s'apparentant à de la tension sont réussis.
Si le film est prenant c'est aussi car les acteurs qui s'y trouvent sont plutôt très bons. Jonathan Feltre, Angelina Woreth et Victor Meutelet en tête. J'étais d'ailleurs satisfait de voir que le personnage de Jonathan Feltre, Rudy, allait être le personnage central, plus mit en avant que ses camarades Rascals. Satisfait car il était celui pour lequel j'avais le plus d'empathie dès le début du film. Cela étant dit, ce qui nous est raconté de lui, notamment sa vie familiale, n'est pas particulièrement intéressante et est plutôt du réchauffé. Pas désagréable pour autant.
L'une des volontés de Jimmy Laporal-Trésor était que ses personnages ne soient pas manichéens, aussi bien les Rascals que les boneheads. Pour ces derniers, il expliquait qu'il ne voulait pas en faire une masse imbécile et incapable de réfléchir, mais qu'au contraire tout ce qu'ils font a été pensé et fait de manière consciente. Ce qui ne veut pas dire cautionnable pour autant. Il est vrai que dans le film, toutes les actions menant à de la violence justifieront aux personnages "victimes" de répondre eux-aussi par la violence. Il n'est donc parfois pas question que de racisme mais aussi de vengeance personnelle. Si les personnages ne sont donc pas caricaturaux, je ne les ai néanmoins pas trouvé particulièrement attachants .
Pourtant, le dernier acte du film marche tout de même bien et la tension est palpable. Dans un entretien, Laporal-Trésor disait qu'il était difficile de trouver des financements à un film ayant un point de vue "radical" et qui n'était ni lisse, ni consensuel. Cela m'avait fait penser au film "Les Misérables" de Ladj Ly qui, en dehors de ses qualités cinématographiques, pourrait être ce que Laporal-Trésor peut considérer de plus "conventionnel". Peut-être donc que la fin du film n'a pas été au goût de tous ceux qui auraient pu mettre la main à la poche pour financer le projet.
Avec ce dernier acte, le réalisateur nous offre un film qui ne manquera pas de secouer certains spectateurs. À noter que "Les Rascals" a tout de même ces moments légers avec la volonté d'y mettre de l'humour, sans que cela soit franchement toujours réussi. Tout comme la relation entre Rudy et sa mère, c'est du déjà-vu et peu original. Le cadre du film lui l'est et cela en fait- avec son dernier acte, un film rafraichissant et plutôt réussi. Bonne surprise.