Suite à l'immense Nous avons gagné ce soir, Robert Wise retourne vers le western, là où il avait déjà œuvré avec Ciel Rouge, en mettant en scène Two Flags West. Il s'intéresse ici à l'opposition entre le Sud et l'Union alors que la Guerre Civile fait rage.
Il met assez vite en place le contexte de l'oeuvre, à savoir un groupe de prisonniers sudistes qui va se voir proposer une libération sur parole s'ils s'engagent avec l'Union le temps de vaincre les Indiens. Peu à peu, il va surtout étudier des hommes face à la guerre et des idéaux, se servant de ce contexte pour les approfondir psychologiquement plus on avance dans le récit et proposer de fort dilemmes moraux, comme celui de choisir qui combattre et comment le faire. Wise s'intéresse surtout à un lieutenant sudiste (remarquable et très sobre Joseph Cotten) qui va devoir subir quelques affronts et dont le metteur en scène de West Side Story met bien en avant la dramaturgie du destin et des choix.
Autour de lui il dresse des portraits consistants, notamment celui du Major de l'Union, dont l'opposition avec le lieutenant, mais aussi son caractère nerveux et son rapport trouble avec sa belle-sœur sont bien écrits et permettent l'avancement du récit. Wise trouve toujours le bon équilibre entre l'action et les personnages, prenant d'abord le temps de les approfondir avant de les mettre dans le feu de l'action jusqu'à une fin sanglante. La force du film se trouve aussi dans la nuance qu'elle apporte, où Wise ne cherche pas à prendre parti pour l'un des deux camps mais surtout à montrer l'humain et les choix qu'il a à faire, que ce soit pour ses idéaux ou sa vie. D'ailleurs, il n'hésite pas à montrer l'absurdité de la Guerre, ainsi que la valeur de l'engagement dans un camp précis comme le montre la dernière partie où les couleurs n'ont plus vraiment de logique.
Two Flags West s'inscrit aussi dans un contexte particulier, celui d'une époque où ce choix a vraiment été proposé par Lincoln aux prisonniers sudistes, montrant notamment que le vrai ennemi, en ces temps-là, a surtout été l'Indien. Wise exploite plutôt bien ce contexte, que ce soit dans les moeurs ou la reconstitution, bien aidée par une belle photographie en noir et blanc. Il se montre tout le long assez sobre et efficace derrière la caméra, tandis qu'il dirige à merveille ses acteurs. En plus du toujours excellent Joseph Cotten, le troublant Jeff Chandler et la belle Linda Darnell endossent leur rôle à merveille, permettant de mieux s'identifier et s'immerger dans cette Guerre Civile (et génocide) dramatique.
Passionnants et touchants portraits d'hommes face à la guerre, des idéaux et dilemmes que tout cela implique, Two Flags West permet à Robert Wise d'aborder la Guerre Civile américaine et d'y mettre en avant l'opposition entre les deux camps, puis face aux indiens et en fait ressortir la pertinence et l'émotion.