Un honnête film d'aventures qui parvient à donne un peu personnalité à un déroulement et un postulat fort stéréotypés et balisés sur le papier. Je ne saurais dire si petites qualités proviennent bel et bien de Tourneur ou tout simplement du scénario. Toujours est-il que j'ai bien apprécié une certaine âpreté des personnages et quelques situations immorales voire sulfureuses. Déjà Ann Sheridan affole les mâles avec son déshabillé, son décolleté et sa transpiration, mais elle embrasse sauvagement Glenn Ford devant son mari après que ce dernier ai fait preuve d'une certaine lâcheté.
Il y a quelques choses de réjouissant dans le comportement des personnages qui parviennent à échapper aux codes attendues. Glenn Ford a l'air le plus souvent totalement désincarné et blasé, laissant s'échapper sans broncher ses deux otages (imposés) ou envoyant quelques répliques bien cinglantes.
Les anciens criminels qui l'accompagne dans son périple ne déméritent pas non plus et se révèlent peu recommandables et pleinement égoïstes, sans être ridiculisés ou diabolisés pour autant.
Autre facteur qui pèse dans la balance, une progression qui refuse le pourtant incontournable écueil du « une épreuve, une victime », évitant de la sorte une structure mécanique.
Cependant le film ne peut tenir sa misanthropie sulfureuse jusqu'au bout et quelques passages ont l'air d'être de grosses concessions à la censure, surtout l'épilogue assez grotesque. De plus la sous-intrigue politique est totalement bâclée avec des troupes militaires très mal intégrées au récit. D'ailleurs la séquence mettant en scène le « président » est totalement hors-sujet et incohérente vis à vis de l'approche «jungle survival ».
Le budget riquiqui doit aussi s'accommoder de 3-4 bouts de studios bien étroits et de quelques stocks-shots peu heureux. Heureusement Tourneur a du métier est parvient à vraiment bien exploiter ces quelques mètres carrés à sa disposition en bricolant avec plus ou moins d'astuce. Il y deux très bonnes scènes d'actions d'ailleurs : une attaque sous la pluie (malgré un sens de l'espace un peu bancal) et le final entre les huttes.
Ca n'en fait pas un chef d’œuvre, ni un classique, mais une commande efficacement exécutée et possédant suffisamment de caractère pour qu'on ne trouve jamais le temps long.