Les Ripoux
La question que je me pose après avoir revu une énième fois ce film (comme les deux autres opus, d'ailleurs) : serait-il possible de réaliser un tel film aujourd'hui sans que la ligue Tartempion ou...
Par
le 13 nov. 2022
13 j'aime
6
Les Ripoux est une des rares comédies à avoir été couronnées du César de meilleur film. C’est étonnant. Fut un temps où pour se dégager de la critique récurrente, véritable antienne de la cinéphilie française, que le cinéma français conchiait régulièrement le genre comique, le le monde du cinéma daignait en faire la tête de gondole en quelque sorte. C’était tellement fréquent et justifié par le fait que la comédie avait pendant des décennies permis au cinéma français de manger et surtout de survivre face à l’agressivité du cinéma américain, que pendant un certain temps, la production française a voulu marquer le coup en promouvant lors de la cérémonie des Césars des comédies françaises ayant un gros succès commercial. Ce fut le cas pour Trois hommes et un couffin ou pour ces Ripoux. Parenthèse fermée, mais fallait bien l’ouvrir pour expliquer pourquoi cette gentille et agréable comédie a été affublée du titre de meilleur film français de l’année.
Les Ripoux est une bonne comédie, un film bien construit, bien écrit, plutôt bien joué, parfois même un peu émouvant, empreint d’une certaine nostalgie comme sait la suggérer Claude Zidi (on pense à certains passages très parisiens d’Inspecteur La Bavure pendant le visionnage de ces Ripoux).
Mais Les Ripoux n’embrasse pas non plus les sommets comme ont pu le faire Le Corniaud ou La grande vadrouille. Les thèmes ne sont pas des plus fracassants. On n’est pas dans la comédie grinçante, à l’italienne. Ca ne fouille pas non plus le bide. Le rythme est doux mais pas non plus percutant.
C’est une bonne petite comédie, gentiment drôle. Sa plus grande valeur réside, je crois, dans la gageure d’avoir réussi à humaniser la corruption des flics. Faire des ripoux des personnages sympathiques n’était pas une mince affaire. Avec une grande intelligence, le scénario à trois de Claude Zidi, Simon Michael et Didier Kaminka joue sur l’opposition éthique entre le vieux briscard magouilleur et le jeune débutant moraliste, avec un renversement lui aussi pour le coup très moraliste sur la fin.
Reste que le point fort du film demeure la figure tutélaire aussi bien que sympathique du géant Philippe Noiret. Que j’adore cet homme! Cette voix, cette mine ronde, au regard si complexe, enfantin, bon, violent, si riche de nuances et de subtilités surprenantes! Notez que Thierry Lhermitte joue très bien l’éberlué, mais Noiret est tellement bien dans son personnage, à la fois truculent et bon vivant, arrimé à ses certitudes autant qu’à des habitudes, sans doute aussi vieilles que lui, mais en même temps le personnage n’est pas non plus dupe. Il sait que sa carrière est derrière lui, que ses petits arrangements avec la pègre et les commerçants sont un petit peu minables. On le sent désabusé, le parfait opposé de son jeune collègue, tout beau tout neuf, plein d’ambition et d’illusions. La voix et l’oeil de l’acteur porte tout ce fatras avec tant d’aisance qu’il ne peut qu’émouvoir, ou du moins attendrir.
Les rôles annexes offrent l’habituel échange de bons procédés classiques, pépères, si ce n’est la bouille de Julien Guiomar, que j’aime d’une admiration et d’un amour particuliers, un des plus beaux acteurs de seconds rôles du cinéma français de la fin du XXe siècle : rond, gigantesque, protubérant, et capable de la finesse la plus étonnante, un dessin de Franquin à lui tout seul.
La réalisation de Claude Zidi est correcte, sans plus, comme d’habitude. Il ne faut jamais attendre un beau plan de ce cinéaste, mais il n’y a pas non plus de fausses notes.
Après avoir écrit tout cela, il me faut concéder que je ne tombe pas en pâmoison devant ce film, alors que c’est typiquement le genre de comédies françaises efficaces pour lesquelles je suis un client assidu. Curieusement, j’aime bien ce film sans qu’il n’y ait la petite étincelle qui me donnerait envie de le revoir souvent. Pourquoi donc, je ne sais trop...
Captures et trombi
Créée
le 26 août 2018
Critique lue 758 fois
8 j'aime
3 commentaires
D'autres avis sur Les Ripoux
La question que je me pose après avoir revu une énième fois ce film (comme les deux autres opus, d'ailleurs) : serait-il possible de réaliser un tel film aujourd'hui sans que la ligue Tartempion ou...
Par
le 13 nov. 2022
13 j'aime
6
Sorti en 1984, césarisé l'année suivante, les ripoux est un film de Claude Zidi et mené par le duo Philippe Noiret/Thierry Lhermitte. L'idée de base est de suivre un duo de policiers, le premier...
Par
le 15 sept. 2021
8 j'aime
1
Un classique du cinéma français populaire des années 80, pour lequel je conserve une affection particulière, d'autant plus que je l'ai découvert tout gamin. L'idée de confronter deux flics que tout...
Par
le 22 mai 2015
8 j'aime
1
Du même critique
Pendant très longtemps, j'ai débordé d'enthousiasme pour ce film. J'ai toujours beaucoup d'estime pour lui. Mais je crois savoir ce qui m'a tellement plu jadis et qui, aujourd'hui, paraît un peu plus...
Par
le 22 juin 2015
55 j'aime
3
Très excité par le sujet et intrigué par le succès aux Emmy Awards, j’avais hâte de découvrir cette série. Malheureusement, je suis très déçu par la mise en scène et par la scénarisation. Assez...
Par
le 22 nov. 2017
54 j'aime
16
août 2012: "Holly motors fuck!", ai-je envie de dire en sortant de la salle. Curieux : quand j'en suis sorti j'ai trouvé la rue dans la pénombre, sans un seul lampadaire réconfortant, un peu comme...
Par
le 20 avr. 2013
53 j'aime
16