Le film fait un peu trop office de plaidoirie pour convaincre, à l’inverse de Mourir d’aimer (que Cayatte tournera quatre ans plus tard) qui sur un thème central similaire – le milieu professoral – nous embarquait très loin dans sa spirale mélodramatique. J’ai le souvenir d’un truc extrêmement physique. Un temps, on pense Les risques du métier fait sur le même moule. Le temps d’une première séquence, ouverture tétanisante où une adolescente sort en larmes en en courant de son établissement scolaire, dans un unique plan séquence suivant ses foulées jusque chez elle. Ça dure pas loin d’1min30 et ça donne le La. Martyrs, de Pascal Laugier reprendra une ouverture similaire d’ailleurs mais le plan sera plus outrancier, de face, en contre plongée. Ici ce n’est pas le personnage qui se cale sur la mise en scène de Cayatte mais l’inverse. Mais la suite est moins vivante, plus théâtrale, l’écriture y est trop prononcée au point de faire sonner faux certains dialogues. Et puis j’ai un problème avec les gosses du film. Ces filles doivent incarner le mensonge et certaines sont dans l’excès de façade à l’image de la petite Hélène, toujours stoïque, les yeux exorbités (sorte de Carole Bouquet ado) qui croyait sans doute jouer dans Le village des damnés. Malgré tout il y a quelques idées de marque : tout d’abord ce superbe dialogue conjugal entre le professeur accusé et sa femme, cette dernière culpabilisant de ne pas parvenir à lui faire d’enfant, poussant selon elle les parents de ses élèves à le considérer comme une menace, un dom juan et non en tant que père de famille. C’est une belle scène car on dépasse soudain le propos du film, on l’aère, on le détache de son obsession de vérité, son côté oppressant et son méticuleux travail procédurier. On ressent peut-être trop que Cayatte fut avocat en fin de compte. Son film peine à transcender son sujet, tout reste au stade de scénario filmé, bien que ce qu’il dit de l’importance du rôle des pères et de la dangerosité du mensonge enfantin vaille le détour, ne serait-ce que dans sa capacité à brouiller les temporalités et en faire un présent évolutif qui conte systématiquement sous flash-back, comme un juge remonterait un dossier en quête de vérité.