Bénéficiant d'une aura bienveillante à Hollywood grâce au succès de son troisième "Mad Max", odeur de sainteté qui n'allait pas tarder à foutre le camp, George Miller adapte ici un roman de John Updike, pour un habile mélange de comédie et de fantastique.
Maniant comme aucun autre l'art du blockbuster gentiment subversif (tout comme Joe Dante à la même période), George Miller, comme il le fera plus tard avec ses superbes "Happy Feet", transforme une simple commande, une inoffensive comédie grand public, en un règlement de compte jouissif entre les deux sexes, d'un côté une gent féminine délaissée et uniquement perçue comme une paire de nichons sur pattes, et de l'autre, des hommes lâches, pleutres, vulgaires, incapables de lacer leurs propres godasses sans l'aide de leur bonne femme.
Grossissant délicieusement le trait, Miller orchestre une guerre des sexes où s'entremêlent psychanalyse et surnaturel, par le biais de personnages attachants et hauts en couleur, de séquences délirantes amenées à devenir cultes (le vomie de noyaux de cerises) et de dialogues incroyablement corsés pour une production grand public ("J'aime bouffer de la chatte après le petit déjeuner" déclame avec le plus grand sérieux du monde un Nicholson en rut), le tout mis en image avec un sens du timing incroyable par un George Miller en pleine forme.
Touchant portrait de femmes tout autant que critique gentiment acerbe d'une société machiste et conservatrice, "Les sorcières d'Eastwick" est un mélange des genres rafraichissant et réjouissant, qui doit beaucoup à la confrontation forcément épique entre le trio de charme Cher / Sarandon / Pfeiffer et un Jack Nicholson en totale roue libre, sans oublier Veronica Cartwright, incroyable en bigote possédée.