M'abandonne pas papa

Le premier film réunissant les Inconnus n'a pas eu une production de tout repos. En effet, suite à des problèmes contractuels avec leur ancien manager Paul Lederman, le trio ne peut utiliser "les Inconnus" durant la promotion et il ne peut pas produire le film ensemble (idem pour la réalisation), menant petit à petit à son explosion. Les trois frères est donc sorti dans un contexte différent de La cité de la peur, estampillé "le film de Les Nuls" (Alain Berbérian, 1994).

Un problème qui s'est confirmé sur le très inégal Le pari (Bourdon, Campan, 1997) et le nazebroque L'extraterrestre (Bourdon, 2000), avant que l'affaire ne soit réglée avant la production des Rois mages (Bourdon, Campan, 2001). Ces problèmes de droits n'ont pas empêché le film de réunir près de 7 millions de spectateurs, tout en obtenant le César du meilleur premier film.

Les trois frères n'est pas un film parfait et sent parfois le best of de certains sketchs du trio. A l'image de Pascal et de ses employeurs tout droits sortis des Publicitaires ; et du passage du Millionnaire renvoyant à leurs diverses parodies de jeux télévisés. La partie road trip est parfois trop longuette et moins inspirée (on sent le trio davantage en roue libre). Mais il reste un certain attachement pour les personnages tout au long du film.

Chacun est un archétype. Didier Bourdon incarne le type qui vit au crochet de sa belle-famille qu'il déteste autant que sa prétendante (Isabelle Gruault). Bernard Campan est vendeur sur les marchés et espère devenir un acteur dans des films autre que pornographiques. Quant à Pascal Légitimus, il joue un publicitaire que ses patrons aiment bien quand ça les arrange et notamment pour lui soutirer de l'argent. Si Pascal se sent au départ plus privilégié que ses frangins, il va vite voir l'envers du décor, notamment lors d'entretiens d'embauche tenant souvent du délirant, voire du racisme pur et simple.

Les trois frères sont des losers par excellence, des gens qui espèrent s'en sortir alors qu'ils sont dans la merde jusqu'au cou. Une galère en amène une autre et ainsi de suite. Il règne dans le film une certaine injustice envers ces personnages, à l'image d'une décision du notaire (Henri Courseaux) tenant de l'invraisemblable et d'un huissier de justice aussi raciste que méprisable (Jean-François Pastout). Des gens qui regardent les trois personnages principaux de haut, tout en se considérant comme irréprochables. Les trois frères ne le sont pas et c'est peut-être pour cela que l'on s'attache à eux. La scène du Millionnaire n'est pas drôle comme c'était le cas des Sousous dans la popoche autrefois. On voit le désespoir dans les réactions des personnages : ils sont à bout et il est temps que cela s'arrête.

Donc si Les trois frères n'est pas un film sans défaut, il a le mérite d'être une comédie drôle et un film social pertinent. On ne peut pas en dire autant de sa suite...